C'est d'une peine exemplaire de 15 mois fermes que l'ex-directeur général du Parti libéral du Canada au Québec, Benoît Corbeil, a écopée, hier, pour un trafic d'influence et de la fraude dans le cadre de ses fonctions, entre 1997 et 2000.

Corbeil, 46 ans, doit en outre payer une amende de 20 000$, et rembourser les 117 315$ qu'il a détournés des coffres du parti, a décrété la juge Suzanne Coupal. «Dans ces temps troubles où la confiance en nos institutions démocratiques semble ébranlée, les tribunaux se doivent de dénoncer et de faire valoir la réprobation des gestes qui pourraient porter atteinte aux valeurs fondamentales de notre société», a dit la magistrate, en annonçant la peine.

 

Vêtu d'un complet-cravate, debout dans le box des témoins et tournant donc le dos à la salle d'audience, Corbeil a accusé le coup sans broncher. Des constables spéciaux se sont rapidement approchés de lui, pour l'amener dans le box des accusés. Il s'est tourné pour envoyer la main à une connaissance dans la salle, puis il est disparu derrière la porte menant aux quartiers de détention du palais de justice de Montréal. Manifestement, il gardait espoir d'éviter la prison, car il était entré dans la salle sans bagage. Un homme de sa connaissance est parti après le prononcé de la peine, puis est revenu avec un sac bleu contenant les affaires de Corbeil.

Une oreille attentive

Les accusations dans cette affaire ont été portées par la GRC, au terme d'une enquête secondaire découlant de l'enquête sur les commandites. Les faits ne sont toutefois pas reliés aux commandites. En 1997, à quelques semaines des élections, Corbeil, alors coordonnateur régional du PLC, avait demandé une contribution de 100 000$ au propriétaire d'une carrière de Saint-Jean-sur-Richelieu qui désirait acheter un terrain appartenant au gouvernement fédéral. En échange, Corbeil promettait une oreille attentive à Ottawa. L'homme avait finalement versé 50 000$. Corbeil avait chargé Alain Renaud d'aller chercher la somme. Ce dernier, devenu plus tard informateur de police, avait obtenu 2000$ ou 3000$ pour sa commission.

En ce qui concerne l'accusation de fraude, elle avait trait à six fausses factures totalisant un peu plus de 117 000$, que Corbeil a approuvées pour paiement entre 1999 et 2000, alors qu'il était directeur général du parti. Corbeil soutient qu'il n'a pas bénéficié personnellement de ces sommes, hormis un cadeau de 5000$ que lui a remis Giuseppe Morselli, propriétaire du Buffet Trio, un partisan qui en menait large au parti. Morselli est décédé depuis.

Corbeil a plaidé coupable en juin dernier aux accusations. Son avocat, Michel Grenier, recommandait une absolution avec un don et des travaux communautaires, tandis que la procureure de la Couronne, Josée Fontaine, demandait de 18 à 24 mois de prison.

En sortant de la salle d'audience, Me Grenier a indiqué qu'il allait voir avec M. Corbeil s'il désirait interjeter appel. Me Fontaine, pour sa part, était bien satisfaite de la peine, qui envoie un message clair à son avis.

Me Charles Côté, avocat du Parti libéral, était bien content lui aussi, notamment du remboursement. Il affirme que l'argent n'est pas allé au PLC, comme Corbeil le soutient.