Opérations policières à la chaîne, meurtres gratuits, incendies suspects et accidents tragiques ont marqué 2009. Retour sur l'actualité criminelle de l'année. 

Opérations à répétition 

Affaiblie par une vague successive de raids policiers, la pègre en a pris pour son grade cette année. Dans la foulée des opérations Axe, Dictature, Borax, Cerro, Machine, Sable, Norte, Engin, Producto et autres, les mafieux, motards et membres des gangs de rue ont été talonnés sans relâche par les forces policières. Le coup de filet le plus spectaculaire a été l'opération SharQc, au printemps, qui a coupé les ailes aux Hells Angels de la province. 

En ce matin d'avril, 1200 policiers ont pratiquement rayé de la carte du Québec tout ce qui portait les couleurs de l'organisation. Au total, 111 des 113 présumés membres des Hells ont été visés, sans compter une quarantaine de sympathisants. Cette frappe sans précédent a fortement ébranlé leurs assises. Avec SharQc, les policiers ont mis le point final à une traque qui durait depuis 10 ans.

Quelques mois plus tôt, les policiers avaient entrepris le ménage avec l'opération Axe, qui visait à démanteler un réseau de distribution de cocaïne actif dans le sud-ouest de la métropole.

Dirigée par les discrets frères Lavertue - dont Jean, ancien athlète olympique -, la cellule fournissait plusieurs kilogrammes de cocaïne chaque semaine aux frères Zephir, associés au Syndicate, qui servaient de pivot entre les gangs de rue et les motards.

Après SharQc, l'opération Machine, en juin, a ensuite porté un dur coup aux trafiquants liés aux Hells Angels qui hantaient le centre-ville de Montréal. Le réseau, dirigé par l'ancien chef des Rock Machine Salvatore Cazzeta - déjà incarcéré dans la foulée de l'opération SharQc -, empochait plus de 2 millions de dollars par année.

Moins de deux semaines plus tard, les policiers ont mis un frein aux activités d'un autre réseau de revendeurs de cocaïne très actif au centre-ville et lié aux gangs de rue. L'opération Norte visait alors les K-Crew, un petit groupe indépendant qui écoulait de la cocaïne et de la marijuana avec la bénédiction des Hells et de la mafia italienne.

Difficile de passer sous silence les opérations Borax et Dictature. La première, au mois de juin, a mis au jour un vaste réseau de production, de distribution et d'exportation de cannabis dirigé par la pègre asiatique. Les organisations ciblées s'affichaient publiquement dans la communauté vietnamienne et transformaient des maisons en serres de production de cannabis avec la complicité d'agentes immobilières.

Quant à l'opération Dictature, en mai, elle a marqué une autre étape dans la lutte contre l'infiltration des Hells dans l'économie légale. Le réseau tentait de monopoliser le commerce de l'esthétique automobile en se servant de l'entreprise X Vitres teintées comme paravent.

Pendant que les grosses pointures de la pègre montréalaise sont à l'ombre, tout porte à croire que les gangs de rue et les petits revendeurs indépendants profitent de la désorganisation pour se tailler une place dans l'échiquier.

Feu à volonté

Treize cafés italiens ont été ciblés dans des attaques au cocktail Molotov depuis la fin du mois de septembre. Des établissements du nord-est de l'île ont surtout été visés, à commencer par ceux du quartier Saint-Michel, chaque fois de la même manière : aux aurores, les incendiaires fracassaient la vitrine du café et lançaient à l'intérieur un cocktail Molotov, qui s'éteignait presque toujours aussitôt.

La Section des incendies criminels du Service de police de la Ville de Montréal vient d'arrêter Mickendy Démosthène, 18 ans, proche des gangs de rue et soupçonné d'avoir joué un rôle dans cette vague d'incendies. D'autres arrestations sont à prévoir.

Plusieurs hypothèses pourraient expliquer ces attaques, notamment le «fractionnement» de la pègre montréalaise. Une autre hypothèse évoque des tensions entre des clans italiens. Tensions qui ne risquent pas de se résorber avec l'assassinat en plein jour lundi de Nicolo Rizzuto, fils du présumé chef de la mafia montréalaise, Vito Rizzuto. L'assassinat de Nicolo Rizzuto fils et les attaques contre les cafés illustreraient l'instabilité qui règne au sein de la mafia montréalaise.

Les incendies des cafés italiens pourraient même avoir été allumés par des gangs de rue à la solde d'un clan italien.

L'assassinat en janvier dernier d'un trafiquant de drogue, Sam Faluso, qui contrôlait vraisemblablement plusieurs cafés italiens, pourrait aussi expliquer les attentats du dernier mois.

Outre ces attaques, la police et les pompiers en avaient déjà eu plein les bras avec plus d'une dizaine d'incendies suspects allumés depuis juin dans des bâtiments du Plateau-Mont-Royal. La police ne croit pas qu'il s'agisse d'actes commis par un pyromane comme l'avaient laissé entendre certaines rumeurs.

Plusieurs incendies ont aussi été allumés dans des chantiers de construction un peu partout dans l'île. L'un d'eux a notamment réduit en cendre 96 appartements du controversé projet immobilier du Faubourg Contrecoeur, en avril dernier, dans l'est de Montréal. Les travaux étaient alors suspendus en raison d'un litige entre le promoteur, Construction Frank Catania et Associés, la SHDM et la Ville. L'enquête policière est toujours en cours et les causes du sinistre demeurent inconnues.

Jessica, Natasha et Léa

Plusieurs meurtres sordides ont aussi assombri l'année. Notamment celui de Natasha Cournoyer. Ce crime violent et gratuit a résonné aux quatre coins de la province. La femme de 37 ans, agente de communications au Service correctionnel du Canada, a disparu le soir du 1er octobre alors qu'elle sortait de la Place Laval, où elle travaillait. Elle a été enlevée au fond d'un stationnement mal éclairé, où était garée sa voiture. Cinq jours plus tard, son corps meurtri a été trouvé sous un pylône électrique à Pointe-aux-Trembles. Un mois jour pour jour après la découverte du corps, Claude Larouche, un menuisier de 48 ans, trahi par un échantillon d'ADN, a été accusé de meurtre prémédité.

En mars, les policiers ont trouvé le corps de Jessica Neilson, une jeune mère de famille de 25 ans portée disparue depuis le mois de décembre 2008. Sa dépouille avait passé plusieurs mois à l'intérieur de sa voiture, garée dans une ruelle du quartier Saint-Henri et ensevelie sous la neige. Le soir de sa disparition, la victime avait quitté sa résidence de l'arrondissement de LaSalle au volant de son Acura blanche pour aller boire un verre avec des amis. Personne n'a été arrêté dans ce dossier.

Certains accidents tragiques ont aussi marqué l'actualité. Difficile de passer sous silence la mort brutale et absurde de Léa Guilbeault, fauchée en juillet par la chute d'un bloc de béton sur une terrasse du centre-ville. Mme Guilbeault et son mari étaient attablés au restaurant Mikasa, rue Peel, pour y souligner leur deuxième anniversaire de mariage de même que le 33e anniversaire de la victime. Cette dernière avait même demandé au serveur la permission de changer de table sur la terrasse. Le geste s'est avéré fatal. Un morceau de béton de plusieurs centaines de livres s'est détaché du 17e étage de l'hôtel Residence Inn Marriott pour s'écraser sur Léa Guilbeault.

Des opérations de déneigement avaient tourné à la tragédie le 3 février, lorsque trois septuagénaires ont péri sous les roues de camions de déneigement à quelques heures d'intervalle.

Le meurtre d'un chauffeur de taxi a marqué la fin de l'année. Mohammed Nehar-Belaïd, 64 ans, a été trouvé sans vie le 2 décembre dans un boisé de LaSalle, quelques jours après sa disparition. Nigel John, 26 ans, a comparu quelques jours plus tard au palais de justice de Montréal pour être accusé du meurtre non prémédité du chauffeur de taxi. Le vol semble être le mobile du crime.

L'assassinat de M. Nehar-Belaïd allonge la liste noire des agressions commises contre les chauffeurs de taxi au cours des derniers mois.