C'est une adolescente aux traits tirés, le visage blême, qui a comparu en Chambre de la jeunesse du palais de justice de Saint-Hyacinthe, sous une accusation d'homicide involontaire, 24heures après avoir découvert son bébé de 21 jours mort, attaqué par un chien husky dans sa résidence de la Montérégie.

Son conjoint de 19 ans - et père du poupon - était présent dans la salle d'audience, de même que plusieurs parents et amis. «Je sais qu'elle n'est absolument pas coupable. Elle n'a pas laissé le bébé sans surveillance. Elle était à moins de 10 pieds de lui. Elle a entendu un bruit anormal. Il était déjà trop tard», a dit le père aux médias. «Elle vient de perdre son enfant. Laissez-la donc faire son deuil en paix», a ajouté une amie, Fanny Girouard.

L'adolescente et sa mère fumaient une cigarette sur le perron lorsque le drame est survenu, vers 15h30, lundi. Tout se serait joué en moins de cinq minutes. L'accusée aurait laissé la porte de la maison ouverte. Le bébé était dans un siège déposé sur le plancher de la cuisine, non loin de l'entrée, lorsqu'il a été attaqué par l'un des trois chiens qui vivaient là. La mort de la petite fille était sans équivoque à l'arrivée des ambulanciers.

Pour sa part, l'avocat de l'adolescente, Me André Williams, se demande où était l'«urgence» de porter cette grave accusation «aussi rapidement» contre «une jeune fille fragile» qui vient de perdre un enfant. Rappelons que la jeune mère avait été hospitalisée la veille pour soigner un choc nerveux.«Je trouve le processus un peu exagéré», a-t-il dit aux journalistes.

La Couronne a décidé d'accuser la jeune mère d'homicide involontaire plutôt que de négligence criminelle. Un parent peut être accusé s'il omet de fournir les choses nécessaires à l'existence de son enfant. «Dans ce cas-ci, le décès résulte d'avoir manqué à protéger son enfant», a expliqué la représentante de la poursuite, Me Caroline Fontaine.

La défense estime que la Couronne a fait ce choix parce que la preuve est plus facile à faire dans un cas d'homicide involontaire. La procureure de la Couronne a balayé ces reproches d'un revers de main: «Nous avions tous les éléments en main pour prendre cette décision. C'est ce qui a été fait.» La loi sur la justice pénale pour les adolescents ne prévoit pas de peine minimale pour ce crime.

La jeune mère de 17 ans a plaidé non coupable. Elle a été mise en liberté sous certaines conditions en attendant son retour en cour le 31 août. Elle ne devra pas avoir sous sa responsabilité des enfants de moins de 12 ans.

Père absent

Lorsque le drame s'est produit, le père, sans emploi, n'était pas à la maison. Il était en train de faire une demande d'aide sociale, a-t-il indiqué avec un calme qui frôlait le détachement. Il a justifié son état par le fait qu'il était sous «forte médication».

Il n'en veut pas au chien qui a attaqué sa fille. «Un chien, on ne contrôlera jamais ça. Ça a beau être le chien le plus gentil du monde, ça a adonné comme ça, c'est tout», a lancé le jeune homme vêtu d'un t-shirt troué aux couleurs d'AC/DC.

Un seul des trois chiens huskies qui vivaient dans la maison de ferme appartenait aux nouveaux parents, et il se trouvait dans une cage au moment du drame, affirme le jeune homme. Les deux autres, en liberté, appartenaient à ses colocataires. Ils n'avaient jamais été agressifs et ne manquaient pas de nourriture, a-t-il soutenu.

La Sûreté du Québec avait aussi arrêté la grand-mère du bébé lundi. Cette femme âgée de 37 ans était alors en visite chez sa fille. Aucune accusation n'a été portée contre elle. «On peut qualifier cela de bonne nouvelle dans les circonstances. Ç'a été un grand soulagement pour elle», a indiqué son avocate, Me Mélissa Côté.

Photo: André Pichette, La Presse

L'un des deux chiens huskies présents sur les lieux du drame.