Bien qu'il fasse l'objet d'une poursuite civile et d'une plainte criminelle, Pierre Lacerte continue de photographier le leader de la communauté hassidique montréalaise, Michael Rosenberg, et son fils Martin, lorsque ces derniers vont prier dans une synagogue d'Outremont.

Le citoyen d'Outremont s'est toutefois défendu de harceler la famille de l'homme d'affaires lors de la reprise de son procès, ce matin, au palais de justice de Montréal. L'homme de 56 ans, qui habite en face de la synagogue située sur la rue Hutchison, soutient qu'il ne fait que documenter des «actes illégaux» commis par M. Rosenberg ou d'autres hommes qui fréquentent la synagogue.

Craignant pour sa sécurité et celle de sa famille, Michael Rosenberg, président du groupe immobilier ROSDEV, s'est tourné vers les tribunaux pour empêcher Pierre Lacerte de l'approcher. Le procès, qui a commencé en août dernier, s'est poursuivi aujourd'hui. La défense a fait entendre M. Lacerte comme premier témoin.

«Ma seule arme, c'est ma plume et je m'arrange pour qu'elle soit bien aiguisée», a lancé celui qui a été journaliste pendant 23 ans dans différents journaux et magazines dont L'Actualité. En 2003, après avoir constaté des «travaux illégaux» à la synagogue, selon ses dires, M. Lacerte a décidé de documenter le tout. En plus de prendre des photos des travaux, il a aussi photographié les voitures qui se garaient en double devant la synagogue, dont celle de Michael Rosenberg.

Pas plus tard que vendredi dernier, Pierre Lacerte a pris une photo de la voiture de Michael Rosenberg, garée en double file devant la synagogue. «Je l'ai pris en photo à 15h56», a-t-il dit à la juge Manon Ouimet. Pierre Lacerte ne considère pas cela comme du harcèlement. Il met ses photos sur un blogue, qu'il a créé le 2 décembre 2007 et dans lequel il a écrit 235 chroniques jusqu'à présent. «Je mets au défi quiconque d'y trouver des propos racistes et antisémites», a-t-il dit.

Aux yeux de Michael Rosenberg, il ne fait aucun doute que les propos de M. Lacerte sont racistes. Depuis 2003, M. Lacerte a multiplié les interventions au conseil municipal d'Outremont pour que M. Rosenberg quitte son poste de président d'une table de concertation interculturelle. En 2007, M. Lacerte a reçu une mise en demeure de Michael Rosenberg, écrite par l'avocat Julius Grey, le sommant de cesser de tenir des propos racistes et antisémites. M. Lacerte a démarré son blogue après avoir reçu cette mise en demeure. Un an plus tard, en 2008, Michael Rosenberg, son fils ainsi qu'un autre membre de la communauté juive hassidique ont intenté une poursuite civile de 375 000$ contre Pierre Lacerte. La cause est toujours devant les tribunaux.

Trois mois après avoir intenté la poursuite civile, Michael et Martin Rosenberg ont porté plainte aux policiers. M. Rosenberg soutient que M. Lacerte le harcèle, notamment en le photographiant, chaque fois qu'il se rend à la synagogue, c'est-à-dire deux fois par jour, sauf le dimanche. «M. Rosenberg m'a expliqué que cela faisait deux ans qu'il se sentait harcelé. Selon ce qu'il m'expliquait, cela pouvait bel et bien être du harcèlement criminel», a expliqué au tribunal plus tôt ce matin l'enquêteur au dossier, le sergent-détective Sylvain Desjardins du Service de police de la Ville de Montréal.

Dans l'espoir que cela cesse, M. Rosenberg a affirmé, plus tôt au procès, avoir dû changer de synagogue alors qu'il fréquentait celle de la rue Hutchison depuis une quarantaine d'années. Son père en est l'un des fondateurs.

De son côté, M. Lacerte persiste et signe. «C'est plutôt moi qui devrais avoir peur d'eux. Je n'ai jamais prononcé de menaces à leur endroit. Je ne leur ai jamais crié de bêtises», a-t-il dit. Par ailleurs, s'il ne nie pas que Michael Rosenberg soit l'une des cibles de son blogue, l'homme d'affaires n'est pas sa première cible, a-t-il souligné. Il estime dénoncer plus souvent les agissements de la mairesse d'Outremont, Marie Cinq-Mars. «Jamais, elle n'a craint pour sa vie, sa sécurité personnelle ou sa Volvo», a insisté Pierre Lacerte, dont le témoignage se poursuit cet après-midi. L'homme de 56 ans n'a pas d'antécédent judiciaire.