Le grand manitou du clan des «narcotorpilles», Gilbert Kelly, est recherché depuis cinq ans. Qu'à cela ne tienne, la Couronne fédérale a choisi de bloquer les biens qu'il aurait acquis grâce à des activités illicites.

L'homme de 66 ans est un importateur de cocaïne de carrière qui aime les grands voyages et les objets de luxe, selon l'un de ses anciens complices devenu agent source de la Gendarmerie royale du Canada, Pierre Tremblay.

Pierre Tremblay témoigne depuis lundi à la demande de la Couronne fédérale devant le juge Salvatore Mascia, de la Cour du Québec. La poursuite soutient que Gilbert Kelly a acquis un appartement à Montréal et divers objets de luxe pour le meubler et le décorer avec les profits tirés de la vente de drogue. Ces biens vaudraient environ un demi-million de dollars.

La Couronne peut déposer une requête visant à confisquer les biens criminellement obtenus après qu'un accusé a été déclaré coupable d'un crime. Si un accusé est en fuite depuis plus de six mois, la poursuite a la même possibilité, mais la tâche est plus ardue.

Le clan des «narcotorpilles» a été démantelé en 2006 à la suite de deux enquêtes (baptisées Cubain et Cabernet) menées de front par la Gendarmerie royale du Canada.

Lorsque les policiers se sont présentés chez Kelly, le 7 décembre 2006, il était en voyage à l'étranger. Il n'a jamais donné signe de vie depuis. En septembre 2007, l'autre cerveau de cette organisation, qui avait ses bases dans l'est de Montréal, Sarto Berthiaume, a été condamné à 12 ans de pénitencier.

Ces vétérans du narcotrafic, selon la police, usaient de moyens originaux pour importer de la cocaïne au Canada. Des équipes de plongeurs attachaient des cylindres en forme de torpille sous la coque ou derrière la grille d'entrée d'eau des bateaux en provenance du Venezuela, à l'insu des capitaines et des équipages.

Selon la GRC, Kelly et Berthiaume ont utilisé ce stratagème cinq fois. Cela a fonctionné trois fois. En 2004, des chargements de 134 et 52 kg ont été saisis en Colombie et au Nouveau-Brunswick. Au moment de la rafle policière, en décembre 2006, un envoi semblable était en préparation pour Sept-Îles, sur la Côte-Nord.

Si l'agent source Pierre Tremblay a permis de condamner plusieurs trafiquants, les agissements des enquêteurs à son endroit ont aussi provoqué la libération de Christopher Tune, l'une des grosses pointures arrêtées dans le cadre de l'opération Cabernet, présumément lié au gang de l'Ouest. En effet, la juge Hélène Morin a décrété l'arrêt du processus judiciaire en janvier dernier parce que l'agent source était en libération conditionnelle pendant qu'il travaillait pour la police fédérale et qu'il a continué à faire du trafic de drogue sans que les autorités carcérales en soient avisées.