C'est avec le moral dans les talons que les procureurs de la Couronne aux poursuites criminelles et pénales ainsi que les juristes de l'État sont retournés au travail, mercredi, au lendemain de l'adoption d'une loi spéciale du gouvernement Charest mettant un terme à deux semaines de grève.

Si le moral n'est pas au rendez-vous pour plusieurs, le président de l'Association des procureurs aux poursuites criminelles et pénales (APPCP), Christian Leblanc, assure que les procureurs feront tout en leur pouvoir pour rattraper le temps perdu.

En entrevue à La Presse Canadienne, M. Leblanc a cependant dit ignorer comment les procureurs vont y arriver, puisqu'ils devaient déjà composer avec une surcharge de travail avant le déclenchement de la grève.

«Les procureurs se sentent méprisés par le gouvernement Charest, a-t-il dit. Ils vont continuer à travailler avec professionnalisme, mais honnêtement, je ne sais pas comment ils vont faire.»

Les conditions de travail des 1500 procureurs et juristes sont maintenant déterminées jusqu'en 2015 en vertu de la nouvelle loi, qui comprend une hausse salariale de six pour cent en cinq ans, alors que les 450 procureurs réclamaient un rattrapage salarial de 40 pour cent pour rejoindre la moyenne canadienne.

M. Leblanc affirme que les procureurs vont dorénavant réclamer le paiement de leurs heures supplémentaires.

Il a confié que si le recours à la Loi sur les normes du travail est nécessaire, les procureurs n'hésiteront pas à le faire.

«C'est fini le bénévolat, a martelé M. Leblanc. S'il faut utiliser la loi pour forcer le gouvernement à se comporter légalement, nous allons le faire. Les procureurs ont tout fait pour convaincre Québec d'ajouter des ressources, sans succès.»

De son côté, le président de l'Association des juristes de l'État, Marc Lajoie, a lui aussi reconnu que le retour au travail a été difficile, puisque les conditions de travail des juristes ont été déterminées avec l'imposition d'une loi.

Il déplore également le bris du lien de confiance - essentiel selon lui - entre le gouvernement et les juristes.

«Il y a des limites à ce qu'il est possible de faire avec une loi. Il est impossible de légiférer le lien de confiance avec une loi. Cela doit se bâtir entre des êtres humains et non avec l'imposition d'une loi», a-t-il dit.

Faisant référence au patron des procureurs de la Couronne, Louis Dionne, qui a refusé de démissionner mardi, Christian Leblanc a lui aussi évoqué le bris d'un lien de confiance.

«Les procureurs-chefs les procureurs-chefs adjoints qui ont démissionné mais qui ont reçu l'ordre de rester en poste vont continuer à faire leur travail. Mais la population, le gouvernement et M. Dionne doivent prendre conscience que le lien de confiance est maintenant rompu», a dit M. Leblanc.

Malgré les appels lancés par le ministre de la Justice, Jean-Marc Fournier, mardi, le président de l'APPCP ne croit pas à une reprise des pourparlers, estimant que le gouvernement est déjà au courant des solutions pour régler ce dossier.

«Le gouvernement était uniquement pressé d'imposer la loi avant le discours inaugural (de mercredi), a-t-il ajouté. Je le sais et le public est aussi au courant. C'était pour des raisons strictement politiques et partisanes, ce n'est pas compliqué.»