Le climat de travail est tendu à la Société de transport de Laval (STL). Un chauffeur, membre du bureau syndical, vient d'être suspendu à la suite d'un incident violent survenu mercredi soir dernier dans la salle des employés du métro Cartier. La police et la STL ont ouvert une enquête.

Ce soir-là, une poignée de chauffeurs en pause dans la salle des employés discutaient du travail de leurs dirigeants syndicaux. Certains se montraient critiques de l'entente intervenue en janvier dernier pour le renouvellement de la convention collective.

L'un des chauffeurs aurait alors composé le numéro de téléphone du bureau du syndicat, puis laissé son appareil ouvert afin que les dirigeants entendent la teneur des discussions. Tout cela, à l'insu de ceux qui étaient en train de les critiquer. Le bureau du syndicat n'est pas situé dans le même immeuble.

Une vingtaine de minutes plus tard, trois dirigeants du syndicat, dont le président, auraient surgi dans la salle des employés pour s'en prendre à l'un des chauffeurs qui avaient tenu des propos critiques à l'endroit du syndicat. «Ça gueulait fort. Les membres du bureau syndical sentaient l'alcool. Il y en a un qui a menacé l'un des chauffeurs de lui régler son cas», ont raconté des témoins de la scène à La Presse.

Une chauffeuse a alors demandé à ses collègues de la laisser souper en paix. Comme ces derniers continuaient de se disputer, elle a convaincu le chauffeur qui venait d'être menacé de sortir du local. Ce collègue est sorti, suivi par le président du syndicat.

Or, avant de sortir à son tour, un autre membre du bureau du syndicat a donné un coup de pied sur le dossier de la chaise de la chauffeuse, laquelle s'est violemment heurtée contre la table, toujours selon les témoins. Elle est en arrêt de travail depuis.

La police de Laval, qui a été appelée sur les lieux, confirme qu'une enquête est en cours dans une affaire de voies de fait survenue au métro Cartier. Le sergent Daniel Guérin ne confirme pas le nom du suspect puisqu'il n'est toujours pas inculpé.

«Le syndicat ne tolère pas la critique. Si on parle contre lui, on est intimidé et harcelé. Après ce qui est arrivé mercredi soir, j'ai peur d'aller travailler», nous a dit l'un des chauffeurs.

La STL dit prendre cette situation au sérieux. Le chef syndical soupçonné de voies de fait a été suspendu au lendemain de l'incident en attendant les conclusions de l'enquête policière. «On a entendu parler de situations d'intimidation. Chaque cas est étudié et on agit en conséquence», a indiqué la porte-parole de la STL, Marie-Céline Bourgault.

De son côté, le président du syndicat, Richard Ouimet, indique être «à 100%» derrière son collègue. Il a refusé de commenter l'incident, préférant attendre la fin de l'enquête policière. M. Ouimet balaie d'un revers de main les allégations d'intimidation: «Notre comité de direction en est à son troisième mandat. On n'a forcé personne à voter pour nous. C'est plus facile d'appeler les journalistes que de venir aux rencontres syndicales.»

Ce n'est pas la première controverse qui secoue le syndicat des chauffeurs d'autobus de Laval depuis quelques mois. Un autre membre du comité de direction, Serge Coderre, a été accusé de voies de fait et de menaces l'automne dernier à la suite d'une dispute avec un représentant de la CSN.

L'été dernier, le bureau du syndicat des chauffeurs d'autobus de la STL voulait se désaffilier de la Fédération des employés et employées des services publics de la CSN (FEEP-CSN) pour se joindre au Syndicat canadien de la fonction publique, affilié à la FTQ. Le 19 août, des représentants de la CSN ont rencontré des chauffeurs de la STL sur leur lieu de travail pour les convaincre de n'en rien faire, ce qui a déplu aux dirigeants syndicaux. C'est alors qu'une dispute a eu lieu entre M. Coderre et un représentant de la CSN. L'homme de 60 ans a plaidé non coupable et doit retourner en cour le mois prochain. L'automne dernier, les chauffeurs d'autobus de la STL ont voté dans une proportion de 87,9% pour quitter la CSN et se sont joints au SCFP-FTQ.