À la mi-janvier 2009, cinq semaines avant de tuer ses enfants, Guy Turcotte a appris que sa conjointe, Isabelle Gaston, le trompait avec Martin Huot, son entraîneur personnel, devenu un ami. M. Turcotte n'arrivait pas à y croire.

C'est Patricia Giroux, entraîneuse personnelle elle aussi et conjointe de Martin Huot à l'époque, qui a révélé cela à M. Turcotte. «Je lui ai dit: «Tu fais ce que tu veux, mais moi, je quitte Martin»», a raconté Mme Giroux, hier, alors qu'elle témoignait au procès de Guy Turcotte. Le cardiologue de 39 ans est accusé du meurtre prémédité de ses deux enfants.

Mme Giroux travaille dans un gymnase qui est une propriété familiale, a-t-elle expliqué hier. Isabelle Gaston, médecin urgentologue, a commencé à s'y entraîner en 2007, après avoir accouché de son deuxième enfant. Par la suite, Guy Turcotte a commencé à s'y entraîner lui aussi. Il a pris Martin Huot comme entraîneur personnel. De fil en aiguille, à partir de 2008, les deux couples sont devenus amis et se sont mis à se fréquenter. Sans compter les entraînements, Mme Giroux estime qu'ils se voyaient au moins une fois par semaine à l'occasion de soupers, de sorties, de petits voyages ou d'activités sportives.

En octobre 2008, Mme Giroux devait justement faire un voyage à Québec avec son conjoint et Isabelle Gaston. Guy Turcotte, lui, ne pouvait se libérer. Finalement, Mme Giroux n'a pu se libérer non plus. Isabelle Gaston et Martin Huot ont décidé d'y aller quand même, ensemble.

Mme Giroux sortait avec Martin Giroux depuis sept ans à l'époque et avait une relation de confiance, a-t-elle dit. Mais un incident survenu lors d'une sortie des deux couples le soir du jour de l'An 2008 (on ignore quoi pour le moment) lui a mis la puce à l'oreille. Tenaillée par ce doute, à la mi-janvier, Mme Giroux a décidé de jeter un oeil dans les courriels de son conjoint «pour la première fois en sept ans». C'est là qu'elle a découvert des messages d'amour démontrant que Martin et Isabelle entretenaient une liaison. «J'ai eu le choc de ma vie... Ils avaient des rendez-vous en cachette pendant que moi et Guy on travaillait», a raconté Mme Giroux, hier.

Mme Giroux n'a pas voulu agir sous l'impulsion du moment. Elle a attendu le lendemain pour appeler M. Turcotte. «Il ne me croyait pas», a dit Mme Giroux. Elle est allée voir M. Turcotte à l'hôpital le lendemain, le jeudi 15 janvier, et lui a montré les fameux courriels. C'était deux jours avant que M. Turcotte, Mme Gaston et leurs deux enfants ne s'envolent pour une semaine de vacances à Cancún (du 17 au 24 janvier 2009).

Le dimanche 18 janvier, Mme Giroux a placé son conjoint devant les faits et lui a annoncé qu'elle le quittait. Dans la semaine, elle a aussi parlé à Isabelle Gaston, qui se trouvait au Mexique. Elle lui a «exprimé» sa façon de penser. «Le mot «exprimer» est faible», a précisé Mme Giroux, hier.

Mme Giroux a quitté son conjoint, et Guy Turcotte a fait de même avec Isabelle Gaston à leur retour du Mexique. Par la suite, M. Turcotte est retourné au gymnase et a annoncé à Mme Giroux qu'il avait loué une maison à Piedmont. «Les deux, on était peinés. Il était abattu, démoli. Je ne l'avais jamais vu comme ça», a-t-elle dit avant d'ajouter qu'il avait l'air de ne pas avoir dormi depuis des jours. Il n'avait cependant pas de propos agressifs envers Mme Gaston, selon elle. Mme Giroux a transmis les courriels incriminants à M. Turcotte, à sa demande, croit-elle.

Bon père

Questionnée par la défense, Mme Giroux a décrit M. Turcotte comme un père aimant et attentif, un modèle de père. Selon elle, c'est lui qui s'occupait le plus des enfants quand les deux couples se voyaient.

Le drame qui a coûté la vie aux petits Olivier, 5 ans, et Anne-Sophie, 3 ans, s'est produit entre le 20 et le 21 février 2009, dans la maison que M. Turcotte louait à Piedmont. Mme Giroux n'en a rien su jusqu'à ce que des enquêteurs de la SQ l'appellent pour lui parler d'un «double meurtre». Elle a tout de suite pensé que les victimes étaient Martin et Isabelle. Le policier lui a appris qu'il s'agissait des enfants. «J'ai crié», a-t-elle dit.

On sait que, le soir du 20 février 2009, entre 18h30 et 20h09, M. Turcotte a relu les courriels incriminants avant de chercher sur l'internet une manière de se suicider. Hier, on a aussi appris que, à 20h27, il avait annulé une rencontre qu'il devait avoir le lendemain avec un agent immobilier pour l'inspection de la maison qu'il était en train d'acheter. Trois minutes plus tard, il a appelé la gardienne qui devait prendre soin des enfants pendant cette rencontre. «Mes plans ont changé. Je n'aurai plus besoin de vous. Merci beaucoup», a-t-il dit avant de raccrocher.

Le procès se poursuit aujourd'hui, à Saint-Jérôme.