Pour obtenir des faveurs sexuelles et des photos nues de quatre filles de sa classe, un élève de 15 ans d'un collège privé montréalais a prétendu qu'il faisait partie de la mafia et qu'il était traqué par un clan ennemi.

L'adolescent leur a dit qu'il était en danger de mort et que la seule chose qui pouvait le sauver était d'envoyer à «l'ennemi» des photos de ses amies nues. Ou encore des vidéos dans lesquelles les filles se caressaient et avaient une relation sexuelle avec lui.

Aujourd'hui âgé de 17 ans, l'adolescent était de retour en Chambre de la jeunesse de Montréal, hier, pour les plaidoiries sur la peine. Il a plaidé coupable en novembre dernier à cinq chefs d'accusation d'agression sexuelle, de leurre informatique et de possession de pornographie juvénile.

L'accusé, qui provient d'un milieu aisé, s'est tenu la tête à deux mains en conservant les yeux au sol durant une grande partie de l'audience. En liberté provisoire, il était accompagné de ses parents. Tous les trois étaient tirés à quatre épingles.

Lorsque la poursuite a montré au juge les vidéos compromettantes où l'on voit notamment l'accusé agresser sexuellement l'une des victimes, le père du garçon est sorti de la salle d'audience, visiblement excédé.

La poursuite a fait témoigner l'une des jeunes filles, que nous appellerons Jessica*, sur les conséquences que cela a eues sur sa vie. La frêle adolescente a dû interrompre son témoignage à plusieurs reprises, s'étouffant dans ses sanglots.

Les jeunes se connaissaient depuis la première secondaire. Les crimes ont eu lieu alors qu'ils terminaient leur troisième année. L'accusé a bâti son personnage d'enfant de mafieux pendant tout ce temps. Il leur a raconté que sa famille était riche et possédait des armes, qu'il faisait lui-même «de la business» avec «ses gars».

Or, en juin 2009, en pleine session d'examens de fin d'année, il a confié à l'une de ses amies qu'il était menacé de mort et qu'il risquait d'être enlevé. Elle devait le rejoindre dans un parc du centre-ville tôt le matin et l'embrasser pour faire diversion, alors que «ses gars» allaient déjouer la tentative d'enlèvement.

Jessica a accepté pour «sauver» son ami. Le garçon a utilisé ce stratagème à quatre reprises, prétextant chaque fois que l'ennemi ne s'était pas présenté. Il a fini par dire à Jessica que ses «gars» avaient trouvé l'ennemi et l'avaient amené à leur «repaire» pour lui régler son compte. Pour le prouver, il a emmené la jeune fille devant une maison, le prétendu «repaire», sans lui permettre toutefois d'entrer.

«Je pensais que ça allait s'arrêter au baiser dans le parc», a dit l'adolescente au juge Denis Asselin, de la Cour du Québec.

La situation a plutôt dégénéré. Toujours selon le scénario construit par l'accusé, le patron de l'ennemi - ce dernier ayant été mis à mal dans le repaire - voulait maintenant des photos des filles en soutien-gorge, puis de leurs seins et, enfin, des photos d'elles complètement nues, révèlent les nombreux messages textes et séances de clavardage entre l'accusé et ses victimes, déposés en preuve par la poursuite.

Les filles ont accédé aux demandes de leur ami, qui répétait qu'il se sentait coupable d'avoir recours à leur aide. Il leur a fait croire que son propre cellulaire et son compte MSN étaient piratés par l'ennemi. Les filles se sont mises à recevoir des messages textes menaçants du genre: «On sait où tu habites», ce qui les confortait dans l'idée que l'ennemi existait bel et bien.

L'ennemi voulait ensuite des vidéos pornographiques. Jessica a accepté d'en faire une, tournée dans la voiture de ses parents, avec la webcam de son portable. Prétextant la mauvaise qualité de la vidéo, l'accusé lui a demandé d'en tourner une autre.

«J'ai commencé à avoir peur de lui. Je trouvais qu'il n'y avait plus rien qui avait du sens dans son histoire, mais en même temps je le croyais quand même, parce que j'avais vraiment confiance en lui», a-t-elle expliqué au juge, avant d'éclater de nouveau en sanglots.

La procureure de la Couronne, Me Marie-Claude Bourassa, recommandera une peine d'un an de garde ouverte dans un centre jeunesse. De son côté, l'avocate de la défense, Me Ginette Gravel, n'a pas encore fait sa suggestion, mais cela risque fort d'être une peine à purger dans la communauté. L'accusé sera de retour en cour le 16 mai pour la suite des plaidoiries sur la peine.

* L'identité des victimes et de l'accusé est frappée d'un interdit de publication.