À la suite de la mort d'un sans-abri et d'un passant, mardi matin, lors d'une opération policière au centre-ville de Montréal, le ministre Robert Dutil a demandé à l'École nationale de police d'améliorer la formation des futurs policiers.

Bien des questions restent pendantes quant à l'utilisation des armes de service par les agents du SPVM. Appelés pour maîtriser Mario Harel, un sans-abri manifestement en détresse psychologique, les agents l'ont abattu. Un passant, Patrick Limoges, a été atteint mortellement à la tête par un ricochet.

«On va regarder l'ensemble des choses mais, ce matin, la directrice générale de l'École de police a été contactée pour voir s'il y aurait des améliorations à apporter à la formation et voir à long terme ce que nous pouvons faire», a déclaré le ministre Dutil aux journalistes, hier, après la période des questions.

Il n'est toutefois pas question d'ajouter une autre enquête à celle que doit déjà faire la Sûreté du Québec, a assuré Mathieu St-Pierre, le porte-parole du ministre. Encore hier, M. Dutil a promis d'agir avec «célérité» pour revoir les règles qui font que, lorsqu'il y a mort d'homme à la suite d'une intervention policière, l'enquête est confiée à un autre corps de police. En Ontario, ces enquêtes sont confiées à une escouade spécialisée qui ne relève pas d'un corps de police.

De son côté, Richard Bergeron, le chef de Projet Montréal, deuxième parti de l'opposition à l'hôtel de ville de Montréal, a soutenu que le gouvernement devrait se doter d'un bureau d'enquête pour ce type de situation, une demande qui avait fait l'objet d'une résolution unanime de la Ville de Montréal au printemps 2010.

Ce bureau, «doté d'un personnel civil entièrement indépendant de la police pour faire enquête, lorsque des civils sont tués ou blessés par des policiers, aiderait à rétablir la confiance du public envers la police et, de ce fait, aiderait les policiers à faire efficacement leur travail en jouissant d'une meilleure collaboration du public», estime M. Bergeron.

Cette instance est réclamée par de nombreux organismes depuis la mort d'Anthony Griffin à Montréal, en novembre 1987, a-t-il rappelé.

«La mort cette semaine de deux civils aux mains de policiers du Service de police de la Ville de Montréal rappelle l'urgence d'agir en ce sens», a-t-il dit.

Dans une lettre transmise hier au ministre Dutil, M. Bergeron soutient que le temps presse: il y a actuellement, dit-il, «une crise de confiance entre une partie importante de la population et la police parce que plusieurs Québécois doutent de la capacité des policiers à faire enquête de façon objective et indépendante lorsque l'objet de leur enquête est un membre de leur propre profession. Le Québec a besoin d'une entité impartiale et indépendante pour faire ce genre d'enquête».

Le ministre Dutil estime pour sa part qu'il faut «regarder en profondeur» les conséquences de la «désinstitutionnalisation» - depuis la fin des années 80, le ministère de la Santé ne garde plus à l'hôpital les personnes qui, sans être atteintes de maladie mentale chronique, arrivent à des moments de profonde détresse psychologique.

Mais le ministre de la Santé, Yves Bolduc, a fait savoir par Natacha Joncas-Boudreau, son attachée de presse, qu'il ne faut pas «stigmatiser les gens atteints de problèmes de santé mentale». «Le geste n'est pas nécessairement lié à la condition de l'individu. Il faut être prudent», a-t-elle dit.