Un mois après la mort par balle de Mario Hamel et de Patrick Limoges, la police de Montréal a obtenu le droit d'augmenter sa réserve de pistolets électriques Taser. Le Service de police de Montréal (SPVM) va bientôt en acquérir 15 nouveaux, portant leur nombre à 57 dans la métropole.

Pour la première fois, quatre postes de quartier triés sur le volet vont recevoir un Taser. La mesure aura aussi pour effet d'augmenter le nombre de ces appareils utilisés quotidiennement en patrouille.

«Ça nous apparaissait tout à fait raisonnable. Au fond, le SPVM demande plus de flexibilité et une quinzaine d'armes nous semble correct», a expliqué hier le président de la Commission de la sécurité publique à la Ville, Claude Trudel.

Depuis l'année dernière, la Commission doit approuver tout achat de Taser par le SPVM. Il s'agit d'une des recommandations contenues dans un rapport de 2010 visant à mieux baliser l'emploi du pistolet électrique à Montréal. La petite arme intermédiaire était tombée en disgrâce en 2007 après la mort, à l'aéroport de Vancouver, d'un ressortissant polonais lors d'une intervention au Taser.

Mais depuis la fin tragique de Mario Hamel et de Patrick Limoges au centre-ville de Montréal, le Taser semble connaître un regain de popularité. Le maire de Montréal, Gérald Tremblay, avait dit quelques jours après leur mort que la ville pourrait en compter davantage. Rappelons que le 7 juin, Hamel et Limoges ont été abattus par des policiers montréalais.

Claude Trudel admet que «ces événements ont eu une certaine influence sur les membres de la Commission».

Même le conseiller Réal Ménard, qui siège à la Commission, a donné son appui à la demande des policiers. Son parti, Vision Montréal, exigeait pourtant il y a un an un moratoire sur l'utilisation du Taser.

«On pense que compte tenu des événements récents, le plan qui vient d'être approuvé est raisonnable, a dit M. Ménard hier. On parle d'une petite augmentation, qui s'assure que le Taser ne devienne pas une arme de patrouille.»

La mesure a reçu un accueil mitigé à la Fraternité des policiers de Montréal. Son président, Yves Francoeur, estime que l'augmentation du nombre de Taser ne doit pas être perçue comme un désaveu du travail des policiers impliqués dans la fusillade du 7 juin.

«Où j'ai un petit peu de misère, c'est qu'on dirait que le Taser est à la mode présentement, alors qu'il y a deux ans on voulait le retirer aux policiers, jugeant que c'était possiblement dangereux», a dit Yves Francoeur.

Il estime que le Taser ne doit pas être considéré comme une panacée. «Je demeure convaincu que lorsqu'un individu a un couteau, qu'il représente une menace pour la vie des policiers ou des citoyens, alors l'arme appropriée demeure l'arme à feu.»

Le SPVM va déployer les nouveaux pistolets électriques dès le début 2012. Avec 57 Taser en leur possession, les policiers montréalais resteront parmi les moins bien lotis en Amérique du Nord. Les policiers de Toronto, par exemple, peuvent compter sur 700 de ces pistolets.

Selon Claude Trudel, cette grande disparité est davantage un atout qu'un handicap. «On est très, très loin de ce qui se fait ailleurs. Aux États-Unis, dans certaines villes, c'est une arme employée presque quotidiennement et les policiers l'ont tout le temps en leur possession, a-t-il expliqué. Nous, on est très loin de ça et je ne pense pas qu'on y arrive un jour. Je ne pense pas que ce soit souhaitable non plus.»

Entre janvier 2008 et mars 2010, les policiers du SPVM ont utilisé le Taser contre 32 personnes. Le Service de police estime que le pistolet électrique a permis d'éviter le recours à l'arme à feu dans six de ces cas.

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PISTOLETS TASER AU CANADA

Combien de pistolets Taser possèdent les services policiers de grandes villes canadiennes?

Montréal: 42 (bientôt 57)

Toronto: 700

Vancouver: 200

Calgary: 468

Ottawa: 150

Halifax: 25

Source : Taser International