Électronicien à la retraite, Gabriel Cantin téléchargeait des images de pornographie infantile en quantité industrielle, se filmait lui-même en train d'agresser une fillette de 3 ans, filmait à leur insu les visiteuses qui se servaient de sa salle de bains et les enfants de l'école en face de chez lui. Ensuite, il classait méticuleusement toutes ces images. Mais l'homme de 72 ans assure qu'il est «humainement impossible de tout regarder» et jure qu'il ne recommencera plus.

«Pensez-vous qu'à 72 ans je vais recommencer pour finir mes jours en prison?», a lancé Cantin, mercredi, alors qu'il témoignait dans le cadre des plaidoiries sur sa peine. La procureure de la Couronne Rachelle Pitre demande huit ans de pénitencier pour le septuagénaire, qui a plaidé coupable de production et de distribution de pornographie infantile, de voyeurisme et d'agression sexuelle. Le rapport de personnalité et l'évaluation psychosexuelle de l'accusé démontrent qu'il minimise ses gestes, qu'il est prompt à se déresponsabiliser et qu'il pourrait récidiver.

«Crimes sévères»

C'est à l'été 2010, alors que le septuagénaire gardait la fillette à la demande des parents, que les agressions sont survenues. Une vidéo de six minutes montre Cantin en train de frotter son pénis sur la vulve de l'enfant, pour ensuite tenter de l'introduire dans la bouche de la petite. «Mets-la dans ta bouche», répète l'homme. «Non, j'aime pas ça», se défend l'enfant. L'homme s'est livré au cunnilingus et à la masturbation sur cette toute petite fille.

Des gestes, que l'accusé a qualifiés de «crime sévère», mercredi, mais «qui ne seraient jamais arrivés» s'il n'avait pas eu à changer la couche de la petite, prétend-il. Il estime que, s'il y a traumatisme pour l'enfant, il viendra non pas de l'agression, mais de l'entourage de la petite qui lui en fera prendre conscience plus tard. «C'est plus tard qu'elle va l'avoir, quand ça va lui être conté.»

«Qu'on me prouve qu'une enfant de 3 ans se rappelle de son changement de couche», a renchéri Cantin, qui soutient avoir entendu dire que, de 0 à 3 ans, «les enfants ne se souviennent pas».

Dans l'assistance, les parents de l'enfant semblaient abasourdis. Bouillant de colère, le père est sorti plusieurs fois avec fracas de la salle d'audience.

«Si ses yeux étaient des fusils, il me tirerait, jériboire!», s'est exclamé Cantin en parlant du père. Il s'est plaint du fait que les parents de l'enfant le traitaient maintenant «comme une ordure», alors qu'il les avait beaucoup aidés.

Un robot qui télécharge

En ce qui concerne la quantité phénoménale de matériel de pornographie infantile trouvée chez lui, Cantin assure que ce n'est pas lui qui téléchargeait tout cela, mais un logiciel capable de fonctionner même en son absence. Bien sûr, c'est lui qui faisait la mise en route, a-t-il admis. Des notes écrites de sa main dans un cahier démontrent qu'il téléchargeait ce genre de matériel depuis 1997. Il a été arrêté à l'automne 2010.

Une agente du SPVM, Brigitte Guérard, a indiqué qu'il s'agissait de la saisie de pornographie infantile la plus importante que le SPVM ait jamais faite. L'homme possédait 46 432 images d'agressions sexuelles sur des enfants, parmi lesquelles celles d'agressions commises sur une fillette par Richard Reber, un pédophile de l'ouest de Montréal condamné à 10 ans de prison en 2010.

«Je ne le connaissais même pas», s'est défendu Cantin.

Quand Me Pitre lui a demandé pourquoi il avait téléchargé tout cela, Cantin n'a pas su quoi répondre. Celui qui prétend que ces images ne l'excitent pas a mis cela sur le compte d'une manie. «J'ai 200 cassots de Kraft Dinner dans mon salon. Pourquoi?», a-t-il rétorqué.

L'avocate de la défense, Audrey Amzallag, demande pour sa part quatre ans de prison, dont on pourrait soustraire une fois et demie le temps passé en détention préventive. Elle souligne que son client vit un emprisonnement difficile. C'est la première fois de sa vie qu'il se retrouve en prison. Il côtoie des gens dangereux, dont un détenu qui a partagé sa cellule avant d'être condamné à perpétuité et qui lui a dit qu'il lui «défoncerait le crâne». Cantin dit être contraint de payer la cantine à des détenus pour assurer sa protection. La juge Céline Lamontagne rendra sa décision le 26 octobre.