La Cour suprême du Canada a tranché en faveur de l'Alliance de la fonction publique du Canada (AFPC), jeudi, dans une bataille judiciaire sur l'équité salariale qui opposait depuis 28 ans le syndicat à Postes Canada.

Dans un arrêt unanime et - fait inusité - prononcé séance tenante, les juges du plus haut tribunal du pays ont donné raison à l'AFPC dans le conflit d'environ 150 millions $ sur l'équité salariale qui l'opposait à la société de la Couronne depuis août 1983.

En prononçant l'arrêt, jeudi, la juge en chef de la Cour suprême, Beverley McLachlin, a indiqué que les motifs expliquant la décision seront dévoilés plus tard.

L'AFPC soutenait que les femmes à l'emploi de Postes Canada faisaient l'objet de discrimination en vertu de la Loi sur les droits de la personne, puisqu'elles empochaient un salaire moindre pour des tâches comparables à celles accomplies par leurs collègues masculins.

Le Tribunal canadien des droits de la personne avait comparé les salaires de 6000 employés actuels et anciens employés, surtout des femmes qui occupaient des emplois de bureaux, avec ceux des hommes de Postes Canada. L'affaire s'est étirée pendant plus d'une décennie d'audiences, avec 410 jours de travail entre 1992 et 2003, ainsi que la formulation de calculs complexes tentant de comparer le travail du personnel masculin et féminin.

Le Tribunal des droits de la personne avait finalement tranché en 2005 que Postes Canada avait enfreint la loi, et approuvé le versement de salaires rétroactifs et d'intérêts de l'ordre de 150 millions $.

La Cour d'appel fédérale avait renversé ce jugement, soutenant que les allégations de discrimination n'étaient pas prouvées. La Cour suprême donne finalement raison au Tribunal des droits de la personne.

28 ans de procédures

Le syndicat s'est bien sûr réjoui de la décision du tribunal mais a déploré tout le temps requis pour régler l'affaire. «Aujourd'hui, nous célébrons une victoire durement gagnée pour l'égalité», a souligné la vice-présidente exécutive nationale de l'AFPC, Patty Ducharme.

«Mais que cette affaire ait traîné pendant 28 ans, c'est tout à fait inacceptable. Le Canada a besoin d'une loi proactive en matière d'équité salariale, pour que les femmes n'aient pas à attendre des décennies avant d'être payées selon la juste valeur de leur travail», a-t-elle indiqué par voie de communiqué.

Le syndicat a aussi fait savoir qu'il ferait pression auprès de Postes Canada pour que les paiements rétroactifs soient versés le plus rapidement possible.

L'une des employées de la société de la Couronne qui avait déposé une plainte au tout début de cette bataille judiciaire en 1983, Ginette Chartrand, a dit avoir pleuré en apprenant la décision de la cour.

«Nous croyions en notre cause. Mais nous n'attendions pas une décision aussi rapide. J'ai pleuré», a-t-elle commenté dans le communiqué syndical.