On ne parle pas d'une incursion en règle, mais les cartels de la drogue qui dévastent le Mexique sont bien présents au Canada, révèle une analyse interne de la GRC.

À l'origine de simples transporteurs de drogue pour les cartels colombiens, ces organisations criminelles ont connu un essor fulgurant depuis une quinzaine d'années, peut-on lire dans un rapport obtenu grâce à la Loi sur l'accès à l'information. Elles sont devenues des organisations de narcotrafic à part entière, contrôlant la production, le transport et la distribution de la drogue.

C'est surtout pour leur violence que les cartels mexicains sont devenus tristement célèbres. Des rivalités entre différents groupes et les efforts gouvernementaux pour les démanteler ont eu des conséquences funestes au Mexique. Presque chaque jour, des dizaines d'assassinats et d'enlèvements sont attribués aux cartels.

La violence attribuée aux cartels a fait plus de 40 000 morts dans ce pays depuis 2006, date à laquelle le président Felipe Calderon a décidé de s'attaquer à ces organisations.

Bien que les États-Unis soient le principal marché des cartels, ceux-ci sont également présents chez nous, constate la GRC. Le Canada sert notamment d'étape pour le trafic vers nos voisins du Sud, et de point de transit vers les marchés d'outre-mer.

«Le trafic de cocaïne est la principale activité criminelle exercée par les cartels mexicains qui a une incidence au Canada, peut-on lire dans le rapport, dont plusieurs extraits ont été censurés. Ces groupes seraient liés à plusieurs vastes saisies de cocaïne réalisées en 2010.»

En mars 2010, les autorités ont saisi plus de 1000 kg de cocaïne au large de la Colombie-Britannique, l'un des plus importants envois interceptés au Canada depuis les années 90. Ces importations, précise le rapport, sont orchestrées par des criminels canadiens qui font affaire directement au Mexique.

Ce constat des forces de l'ordre n'étonne guère Irvin Waller, professeur de criminologie à l'Université d'Ottawa. La cocaïne, produite en Colombie, a toujours transité par le Mexique. Il n'est donc pas étonnant que la drogue qui se retrouve chez nous passe par les cartels.

«C'est clair qu'il y a une route de transport qui passe par le Mexique, et c'est clair que le trafic, notamment de la cocaïne, est contrôlé par les cartels une fois que la drogue est au Mexique, observe-t-il. Ce n'est donc pas du tout étonnant qu'ils livrent d'une manière ou d'une autre la drogue ici.»

Pas une incursion

Faut-il pour autant craindre une flambée de violence comme celle qui ravage le Mexique? Pas du tout, précise la GRC dans son rapport.

«Il apparaît injustifié de caractériser une présence minime des cartels mexicains ou leurs liens ténus avec le trafic de la cocaïne hors du Mexique comme une incursion des cartels au Canada caractérisée par de lourdes répercussions et l'intensification de la menace dans l'environnement criminel canadien», précise le rapport.