La mort d'un sans-abri, hier, est une mort de trop, selon le Réseau d'aide aux personnes seules et itinérantes de Montréal (RAPSIM). L'organisme demande au gouvernement d'instaurer un nouveau mécanisme d'enquête sur les opérations policières qui entraînent la mort de sans-abri.

Pierre Gaudreau, coordonateur du RAPSIM, est outré que l'enquête sur la mort d'un homme dans la station Bonaventure, hier, ait été transférée à la Sûreté du Québec. «Le ministre Dutil a ajouté l'injure à l'insulte en confiant une fois de plus l'enquête à la SQ. Nous, on n'accorde aucune crédibilité aux enquêtes de la police sur la police», a-t-il déclaré à La Presse.

M. Gaudreau rappelle qu'il s'agit de la deuxième mort d'un sans-abri en sept mois. L'été dernier, Mario Hamel a été tué par des policiers alors qu'il était en crise et armé d'un couteau. Patrick Limoges, un cycliste qui se rendait à son travail en BIXI, a également perdu la vie après avoir été atteint par une balle perdue.

«Si je fais un geste qui entraîne la mort d'une personne, immédiatement je serai interrogé, peut-être même avant l'arrivée de mes avocats. Je ne rencontrerai pas mes psychologues, mes dirigeants, mes conseillers syndicaux. Il y a de quoi de tordu qui existe dans le mécanisme», affirme M. Gaudreau.

Malgré tout, il estime que certaines améliorations ont été apportées au fil des ans, par exemple dans le cursus scolaire des futurs policiers, mais aussi dans les formations qui sont offertes aux agents déjà en service au SPVM.

«Mais il doit y avoir une autre option que de tirer», précise M. Gaudreau. Au lieu de sortir leur arme, les policiers devraient faire appel à d'autres ressources, comme l'urgence psychosociale ou l'équipe d'intervention à l'intention des personnes itinérantes.

Moins de trois secondes

L'ex-commandant aux crimes majeurs du SPVM, André Bouchard, croit quant à lui qu'il est difficile de juger le travail des policiers, qui doivent parfois prendre une décision très rapidement devant certaine menaces. «Si quelqu'un est agressif, qu'il attaque avec un couteau, on n'a pas le temps de parlementer», explique-t-il.

Il reconnaît cependant que le travail peut être difficile pour les policiers qui sortent des bancs d'école. «Un policier qui se promène rue Sainte-Catherine depuis 20 ans, il connaît son monde. Il est capable de parlementer. Il sait qu'il n'y a pas réellement de danger. Mais un gars qui sort de l'école et qui, tout de suite, fait face à une personne en crise, il ne réagira pas nécessairement pareillement.»

M. Gaudreau rappelle que les policiers utilisent leur arme en dernier recours. «On ne parle pas d'une demi-heure. On parle de trois secondes. Quelqu'un s'en vient avec un couteau. Qu'est-ce que tu dois faire? C'est malheureux qu'on soit obligé de tirer des fois. Mais ça fait partie du métier de policier. Je ne connais pas un policier qui a aimé tirer dans sa carrière.»

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Nombre d'enquêtes sur un policier du SPVM confiées à un autre corps de police:

2007: 9

2008: 25

2009: 11

2010: 20

Source : SPVM, Rapport annuel 2010