Dans sa cellule de la prison de Rivière-des-Prairies, Paul Laplante, accusé du meurtre prémédité de sa femme, Diane Grégoire, se «préparait au combat» pour laver sa réputation. Dans un geste insensé, il aurait plutôt décidé d'emporter ses secrets dans la tombe et de se suicider.

Lundi, vers 10h30, le camionneur de 54 ans a été trouvé pendu dans sa cellule, dans une aile où les détenus sont isolés les uns des autres et sous haute surveillance.

«Les ambulanciers ont exécuté des manoeuvres de réanimation pendant plusieurs minutes et l'ont transporté au centre hospitalier Le Gardeur», explique Guy Saint-Pierre, d'Urgences-santé.

La mort de l'homme a été constatée vers midi.

Paul Laplante attendait en prison son prochain passage en cour, le 20 février. On devait alors fixer une date pour l'enquête sur sa mise en liberté provisoire, qu'il entendait obtenir.

Il devait comparaître au palais de justice de Salaberry-de-Valleyfield parce que les ossements de Diane Grégoire ont été découverts non loin de là, à Coteau-du-Lac, sur un terrain boisé, le 21 novembre dernier, près de quatre ans après la disparition de la défunte.

De nombreuses battues et fouilles ont eu lieu, la plus remarquable étant cette énorme opération de tamisage de la terre d'une ferme porcine de Saint-Valérien-de-Milton, pilotée l'automne dernier par la police de Longueuil, qui n'avait pas encore cédé sa place à la Sûreté du Québec.

Deux avocats, deux opinions

Paul Laplante avait embauché deux avocats criminalistes dans les derniers mois: Me Robert La Haye, chargé de veiller au respect de ses droits pendant l'enquête policière, et Me Marc Labelle, plaideur de renom habitué aux causes d'homicide en apparence inextricables.

Les deux ont une perception bien différente de ce suicide.

«Il était dans un état de dépression très important. Il ne faut pas oublier qu'il était en isolement total et qu'il lui était interdit de communiquer avec sa famille», explique Me La Haye. Il estime en outre que le public, qui n'aurait pas respecté la présomption d'innocence dont bénéficie chaque accusé au Canada, a une lourde part de responsabilité dans la mort de son client.

«Comment aurait-on pu trouver un jury pour lui faire un procès impartial avec le procès parallèle qui lui a été fait sur la place publique? Il bénéficiait de la présomption d'innocence dans le système judiciaire, mais pas dans le public. Il a décidé de se juger lui-même, probablement parce qu'il ne croyait plus au système de justice.» À son avis, même mort, l'homme doit être présumé innocent.

Me Labelle, qui a vu son client la semaine dernière, estime pour sa part que Paul Laplante était «en mode combat» et qu'il «voulait contester les accusations»: «M. Laplante ne donnait aucun signe de découragement. C'était un homme accablé bien sûr par la situation, mais pas quelqu'un de découragé, morose ou qui semblait ruminer des pensées suicidaires. Il était plutôt affairé à comprendre le système et les options qui s'offraient à lui, et à réunir les garanties nécessaires pour l'enquête sur sa mise en liberté devant la Cour supérieure.»

Selon un intervenant du système correctionnel, quand il a été amené en détention après sa mise en accusation, il blaguait même au sujet de ses menottes, qui lui faisaient «de beaux bracelets».

Mais on ne connaîtra jamais la défense que Paul Laplante entendait présenter.

«La preuve, normalement, ne sera pas rendue publique, explique Me Labelle. Moi, j'ai la partie qu'on m'a remise. Les enquêteurs et la famille sauront ce que contient la preuve, mais le dossier va être fermé avec un certificat de décès.»

Un point final

Bonne amie de Diane Grégoire, Dorice Cusson se dit soulagée par la mort de Laplante. Cela mettra selon elle un point final au calvaire de ses enfants, qui auraient souffert de ce long feuilleton puisqu'il aurait bien fallu attendre un an ou deux avant que ne commence le procès de leur père pour le meurtre de leur mère.

«Je ne suis pas dans leur tête, mais ça n'est pas facile. Élizabeth [Laplante] était partie en voyage justement pour se changer les idées. Elle va avoir tout un retour», déplore la femme.

Contrairement à Me La Haye, elle ne croit pas que les médias aient failli à leur tâche et orchestré un procès public. «Au contraire, cela a motivé les enquêteurs à continuer et les gens à continuer de leur fournir de l'information», croit-elle.