L'histoire de Joël Debellefeuille ressemble beaucoup à celle de Jeff Cléophat. Mais son dénouement est porteur d'espoir: l'accusé a récemment eu gain de cause devant la Cour d'appel.

Intercepté au volant de sa BMW par un policier de Longueuil en 2009, puis accusé d'entrave, ce courtier en transport a obtenu que les tribunaux reconnaissent que le juge de première instance avait commis une erreur en ne prenant pas en considération la défense de profilage racial.

«C'est un petit pas de géant!», s'est exclamé Fo Niemi, directeur général du Centre de recherche-action sur les relations raciales (CRARR), au sortir de la comparution.

Grosse victoire en effet, puisque le juge a décrété que la cour municipale n'a pas le droit de simplement reléguer les défenses de profilage racial au comité de déontologie policière. Dorénavant, les causes de profilage racial pourront être entendues devant n'importe quel juge.

«C'est un premier pas», a résumé Joël Debellefeuille après le verdict.

Sa saga judiciaire a débuté en juillet 2009, lorsqu'un agent de la police de Longueuil l'a intercepté au volant de sa BMW noire, sans motif apparent.

La Couronne a plaidé que le policier avait trouvé bizarre de voir un Noir au volant d'un véhicule enregistré au nom de Debellefeuille, qui «sonnait québécois», avait candidement fait valoir le policier devant le tribunal.

Ce dernier croit aussi avoir vu le conducteur jeter un mégot de cigarette par la fenêtre de son véhicule.

Lors de son arrestation, M. Debellefeuille, 36 ans et sans antécédents judiciaires, a rouspété et plaidé être victime de profilage racial. La même semaine, il avait été arrêté trois autres fois pour des «vérifications au hasard». Il s'en est tiré avec deux contraventions.

Fin septembre 2010, le juge Marc Gravel a rendu son jugement. Coupable. Le tribunal a estimé ne pas avoir les compétences pour s'immiscer dans les affaires de déontologie policière. M. Debellefeuille a porté la cause en appel et a eu gain de cause. Selon lui, le profilage racial était clairement le motif de l'arrestation.

«Il n'y avait aucune autre raison de l'arrêter. M. Debellefeuille a été adopté. Le policier a fait preuve d'une profonde méconnaissance de la réalité et de la diversité du Québec», tranche son avocat, Aymar Missakila.

La Ville de Longueuil a décidé de maintenir les accusations et Me Missakila vient de répliquer en déposant une requête en arrêt des procédures en vertu de la Charte pour motifs de profilage racial et détention illégale. Le procès reprendra en mars.