Fermé d'urgence par les autorités après avoir été ciblé à deux reprises par des attentats au cocktail Molotov, un bar du quartier Centre-sud a tout de même été victime d'une troisième attaque quelques jours plus tard.

Des individus ont de toute évidence le bar Le 2801 de la rue Ontario dans le collimateur. Et sa fermeture le 24 mars dernier sur l'ordre express de la Régie des alcools, des courses et des jeux du Québec ne semble à première vue pas y changer grand-chose.

Le dernier incident en lice s'est produit dans la nuit du dimanche 28 mars. Un suspect a fracassé la vitrine du bar à l'aide d'une brique d'une quinzaine de livres. Un témoin aurait ensuite aperçu le suspect s'enfuir à vélo. L'établissement venait de subir deux attaques au cocktail Molotov en moins d'un mois.

Même s'il est possible que le dernier incident ne soit pas lié aux attaques au cocktail Molotov, le Service de police de la ville de Montréal n'est pas dupe. «La surveillance est augmentée dans ce secteur», a d'ailleurs souligné l'agent Olivier Lapointe.

Le bar serait au coeur d'une guerre de territoire entre revendeurs de drogue du quartier Centre-Sud.

Le propriétaire de l'établissement, Patrick Corbeil, avait été convoqué d'urgence le 24 mars devant le tribunal de la Régie à la suite des attentats au cocktail Molotov.

Devant les régisseurs, plusieurs policiers -dont un témoin expert sur les gangs de motards- avaient tour à tour dressé un sombre portrait de l'endroit et de son propriétaire.

Outre les attaques au cocktail Molotov, des allégations de trafic de stupéfiants, de voie de fait et de liens avec les motards ont convaincu les régisseurs de révoquer le permis du bar sur-le-champ.

Devant la Régie, un expert du SPVM qui travaille à la section des renseignements se disait convaincu que les deux attaques ciblées contre le bar constituaient des «messages» envoyés au propriétaire.

Des policiers du module moralité, des alcools et des stupéfiants de la région Sud - qui ont mené l'enquête - ont aussi évoqué des liens entre les Hells Angels et le propriétaire du bar, Patrick Corbeil.

Ce dernier était d'ailleurs déjà dans la ligne de mire des policiers, après avoir été arrêté en octobre 2009 dans le cadre d'une rafle.

Selon les policiers, Le 2801 servait de point de chute pour la vente de stupéfiants. Un revendeur était apparemment posté de l'ouverture à la fermeture à l'intérieur du bar.

La sentence musclée du 24 mars a été imposée en vertu d'une mesure d'urgence exceptionnelle décrétée par la Régie, appliquée contre seulement huit établissements licenciés depuis 2002.

La Régie peut recourir à cette mesure lorsque la poursuite des activités du bar est susceptible de compromettre la vie ou la santé de la population.

Selon l'avocat qui représente le propriétaire du 2801, le recours à cette mesure exceptionnelle n'empêche visiblement pas les actes de vandalisme contre le bar. Me Éric Sutton reproche également à la Régie d'avoir suspendu le permis de l'établissement, même si le propriétaire venait de le vendre et s'était engagé à ne pas le rouvrir jusqu'à son passage chez le notaire le 12 avril. Vu les circonstances, la transaction a été annulée. «S'il (mon client) avait encore son permis en vigueur, l'acheteur en aurait fait l'acquisition le 12 avril », a déploré l'avocat.

La suspension du permis sera effective jusqu'à ce qu'une décision finale soit prise dans ce dossier. Une audience est fixée le 9 avril.