La vendetta, orchestrée par on ne sait trop quels membres du crime organisé italien ne semble pas vouloir avoir de fin. Le dernier visé est Antonio Pietrantonio, qui lutte toujours pour sa survie à l'hôpital après avoir été atteint par balle mardi soir sur la rue Jarry, dans Villeray.

Surnommé Tony Suzuki, en raison de ses intérêts de jadis dans une concession de cette marque de voiture, l'homme de 48 ans a été atteint d'un projectile d'arme à feu au haut du corps près d'un restaurant de la rue Jarry, à l'angle de la rue Chambord.

Le tireur a ensuite pris la fuite.

Quelques minutes plus tard, une voiture volée a été retrouvée incendiée pas bien loin du lieu du crime, à l'angle des rues Jacques-Casault et Joseph-Quintal dans Ahuntsic.

Si la police de Montréal refuse d'officialiser tout lien entre les deux événements, il s'agit là d'une signature bien connue dans les règlements de compte au sein du crime organisé. Les bandits commettent leur crime, fuient dans une voiture volée qu'ils incendient un peu plus loin pour prendre la poudre d'escampette dans une autre voiture.

Pietrantonio a été transporté à l'hôpital où son état est jugé critique.

Le 25 octobre dernier, son bras droit, Lorenzo Lopresti, avait été assassiné sur son balcon, à Saint-Laurent.

Pietrantonio possède un casier judiciaire remontant aux années 1990. En 1993, il avait notamment été arrêté par la GRC dans une rafle visant des trafiquants de drogue, aux côtés du caïd Raynald Desjardins. Il avait toutefois été acquitté des principaux chefs d'accusation.

Ce même Desjardins était d'ailleurs considéré comme un des joueurs importants de la succession des Rizzuto à la tête de la mafia montréalaise.

Tony Suzuki fut jadis proche des Rizzuto. D'ailleurs, dans la preuve amassée au cours de l'enquête anti-mafia Colisée, qui a abouti en  novembre 2006 par l'arrestation de dizaines de mafiosi, dont les dirigeants Rizzuto, Arcadi, Renda et Sollecito, on lit le nom de Pitrantonio à plusieurs endroits, même s'il n'a pas été arrêté lors de cette opération.

Le 6 février 2006 par exemple, Pietrantonio et Francesco Del Balso, un des plus hauts gradés d'alors du clan Rizzuto, ont discuté au téléphone d'un «problème», alors que la GRC les avait placés sous écoute. Un vendeur de voitures d'Encan H. Grégoire avait été passé à tabac sur son lieu de travail, par deux des leurs, car il avait envers eux une dette de 100 000 $. Del Balso craignait que la victime qu'ils avaient «cracké», pour utiliser leur jargon, ait mentionné le nom du commanditaire de l'agression quand il a porté plainte à la police.

Pietrantonio aurait alors annoncé que le lendemain il irait voir la victime pour vérifier. On ne sait s'il l'a fait, mais apparemment, l'homme a réglé sa dette le lendemain.

Dans cette volumineuse preuve, les scénarios le mettant en scène en sont surtout de collecte d'argent d'endettés envers le clan. Dans bien des cas, son nom est mentionné aux côtés de ceux de Francesco Arcadi, Del Balso et Lorenzo Giordano, des dirigeants ne craignant pas d'user  ou de commander de la violence pour faire régner la famille.

Tony Suzuki se serait par contre à un moment donné mis à dos les dirigeants du clan Rizzuto, surtout Arcadi et Giordano, peu de temps avant la vague d'arrestation de novembre 2006, en raison de sa prise de position jugée par certains membres du clan sicilien comme une trahison en faveur de rivaux. Dans une conversation obtenue par la GRC, Giordano expliquait qu'il avait parlé à Pietrantonio pour lui dire qu'auparavant, il pouvait s'adresser à Francesco Arcadi pour obtenir de l'aide quand il avait des problèmes, mais que ça ne pouvait plus être le cas, car il les avait «abandonnés devant d'autres personnes».