Le 19 février 2009, René Angélil confie au Journal de Montréal avoir «un problème de jeu».

Le 2 mars 2009, René Angélil déclare à TVA que non, il n'en a pas, en tout cas, «pas comme on l'a dit».

Qui dit vrai? René Angélil ou René Angélil? De versions en nouvelles versions, les personnes qui s'intéressent de près au jeu pathologique tendent l'oreille et sursautent par moments.

 

«En tout cas, moi, son entrevue avec Paul Arcand me confirme qu'il a effectivement un problème de jeu», dit Isabelle Martin, responsable du volet prévention au Centre international d'étude sur le jeu et les comportements à risque chez les jeunes de l'Université McGill.

René Angélil, note-t-elle, continue de croire bien à tort que le poker est essentiellement une question d'habileté. «Ça reste un jeu de cartes. Or, on n'a aucun contrôle sur celles que l'on reçoit.»

«Prenez le jeu d'échecs, qui est le jeu d'habileté par excellence, poursuit Mme Martin. Année après année, le champion est le même. Au poker, au contraire, ça change tout le temps, comme quoi la chance compte pour beaucoup.»

Tout comme les joueurs pathologiques, dit Mme Martin, René Angélil affirme avoir «trouvé la formule» pour battre le casino au black-jack. «Si c'était vrai, pas mal de casinos auraient fermé! Il est vrai que certains joueurs peuvent arriver à déjouer les casinos par moments, mais dès qu'ils s'en rendent compte, les casinos réagissent.»

«René Angélil répète que Céline Dion est son meilleur pari, enchaîne Mme Martin. En réalité, le talent n'est pas le fruit du hasard. C'est le talent et le travail acharné de Céline Dion et de René Angélil qui expliquent leur réussite.»

Serge Chevalier, sociologue à la Direction de santé publique de Montréal, note pour sa part que René Angélil paraît fort. Se multiplier en entrevues en parlant de ses problèmes de jeu, «et ce, au moment où il s'occupe des petits jeunes (Star Académie), c'est un excellent coup publicitaire.»

«René Angélil est un homme d'affaires et là, ce qu'il veut, c'est vendre des livres. Nous, de la santé publique, ne sommes pas dupes de cette opération mercantile, mais cette opération a certaines répercussions positives pour nous. (...) Il est intéressant que quelqu'un d'aussi populaire dise ouvertement qu'il a un problème de jeu. Cela peut amener d'autres personnes à en faire autant dans leur milieu et être ainsi encouragées à aller chercher de l'aide», dit-il.

Après avoir dit qu'il aurait pu y laisser sa chemise s'il n'avait pas pris certaines précautions, René Angélil continuait, chez Paul Arcand, à dire qu'il était convaincu que les bons joueurs pouvaient gagner plus d'argent qu'en perdre en jouant au poker. «En fait, nuance Mme Chevalier, de la même façon que Tiger Woods fait plus d'argent en dehors du terrain de golf, les joueurs professionnels de poker gagnent surtout leur argent en commandites ou en donnant des leçons de poker.»

Ou alors, en exploitant les nombreux débutants au poker. «On a, au Québec, des joueurs professionnels qui participent à trois ou quatre tournois sur l'internet par jour et qui sont là pour faire des ravages chez les débutants. Ces gens-là croient que c'est un job comme un autre.»

Pour sa part, Alain Dubois, porte-parole d'EMJEU (Éthique pour une modération du jeu), trouve en un sens que René Angélil fait effectivement oeuvre utile en avouant qu'aussi riche qu'il puisse être, lui aussi aurait pu être mis à la rue s'il n'avait pas pris certaines précautions.

N'empêche, aux yeux de M. Dubois, M. Angélil envoie un message contradictoire «lorsqu'il dit qu'on peut gagner sa vie en jouant au poker. Il aurait eu intérêt à faire l'addition de ses gains et de ses pertes, mais c'est le propre des joueurs d'avoir une mémoire sélective et de ne se souvenir que de leurs victoires».