Avec 557 décès sur la route en 2008, le Québec a connu son meilleur bilan routier depuis l'étatisation de l'assurance automobile pour les personnes, en 1977. En chiffres absolus, il n'y a jamais eu aussi peu de morts sur les routes en un an depuis 1948 - on avait connu un sommet en 1973, avec 2200 décès.

L'an dernier, le Québec a enregistré 64 décès de moins qu'en 2007, une baisse de 10%. Par rapport à la moyenne des cinq dernières années, le nombre des décès est en baisse de 16%, révèlent les plus récentes données de la Société de l'assurance automobile du Québec rendues publiques hier. Pour la ministre des Transports, Julie Boulet, cette amélioration est la conséquence de plusieurs décisions prises par Québec lors de la refonte du code de sécurité routière, en 2007. L'interdiction d'utiliser le cellulaire au volant, l'obligation d'avoir des pneus d'hiver, l'imposition des cours de conduite et la limitation de vitesse des fardiers ont contribué au bon bilan de 2008.

Hier, la ministre Boulet a souligné que le gouvernement n'avait pas renoncé à la réduction du taux d'alcoolémie de ,08 à ,05 pour les automobilistes - le Québec est la seule province toujours à ,08, rappelle-t-elle. Une réduction à ,05 diviserait par quatre les risques d'accident dûs à la consommation d'alcool.

Pour Jean Marie De Konink, responsable de la Table sur la sécurité routière, cette recommandation devrait revenir à l'agenda à Québec. Surtout, dans quelques pays européens, en Scandinavie notamment, la limite d'alcool dans le sang est désormais de ,02. Selon lui, le Québec peut viser à réduire à 300 le nombre des décès annuels, en appliquant des normes aussi strictes que dans certains pays européens, la Belgique et la Suisse par exemple.

Minoritaire à l'Assemblée nationale, le gouvernement Charest avait été empêché de réduire le taux d'alcoolémie à ,05 dans la refonte du code de sécurité routière.

Mieux à Montréal

La baisse du nombre de décès suit les niveaux records de 2006 et 2007, une période où les policiers de la Sûreté du Québec, pour exercer des moyens de pression sur l'employeur, ne donnaient plus de contravention pour excès de vitesse.

La situation s'est grandement améliorée à Montréal, où le nombre de décès a diminué de 20% en un an (45 à 36). Le nombre des décès a diminué de 41% à Laval, de 28% en Montérégie et de 30% dans Lanaudière.

Il en va tout autrement à Québec, une région frappée par des moyens de pression des policiers. Le nombre de décès sur route y a grimpé de 33% (36 à 48).

La réduction des décès se retrouve aussi aux États-Unis. Un autre facteur a joué: la crise économique et le prix élevé de l'essence - il s'est vendu 2% moins d'essence en 2008, réduisant d'autant le nombre de kilomètres parcourus.

Par type de véhicule, on constate que les motocyclettes sont moins à risque - il y a eu 20% moins de décès en 2008 par rapport à 2007. Les mortalités ont diminué de 28% par rapport à la moyenne des cinq dernières années. Les décès de chauffeurs de camions lourds ont aussi beaucoup diminué, à 9 l'an dernier par rapport au sommet de 25 en 2005.

Les jeunes continuent à être surreprésentés chez les accidentés. Ils sont impliqués dans 23% des accidents, et ne représentent que 10% des conducteurs, observe la ministre Boulet.

Pas de hausses

De son côté, le président de la SAAQ, John Harbour, a relevé que l'amélioration du bilan réduisait passablement la pression sur les finances de l'organisme. Pour équilibrer le plan d'assurance, la SAAQ avait dû imposer des hausses importantes du coût des immatriculations et des assurances pour les années 2008, 2009 et 2010. «Il y avait alors des pertes anticipées de 500 millions. On avait décrété 300 millions sur trois ans, avec 2$ par année sur l'immatriculation et 12$ sur le permis de conduire», rappelle-t-il.

Il manquait 200 millions sur trois ans, qu'on pensait atteindre avec l'amélioration du bilan routier. Les résultats de 2008 sont encore meilleurs qu'attendu, explique-t-il.

Aussi n'y aura-t-il pas lieu d'aller au-delà, d'ajouter aux augmentations déjà arrêtées à cause des résultats catastrophiques de la Caisse de dépôt, a laissé entendre M. Harbour.

Les réserves actuarielles de la SAAQ placées à la Caisse ont été durement frappées en 2008, soit une ponction d'environ 25%, plus de 2 milliards. Mais la possibilité d'étaler sur 15 ans ces déficits pour revenir à un régime pleinement capitalisé permettra d'éviter des hausses supplémentaires à celles déjà annoncées, a indiqué M. Harbour.