Près de 12 000 personnes ont perdu le droit d'emprunter des livres à la Grande Bibliothèque parce qu'elles ont accumulé des amendes trop élevées dans leur dossier, révèlent des données obtenues par La Presse. L'institution leur offre une chance unique de repartir à neuf cette semaine.

Bibliothèque et Archives nationales du Québec (BAnQ) a décidé de célébrer son quatrième anniversaire en offrant un cadeau à ses abonnés qui lui donnent pourtant le plus de fils à retordre: une amnistie d'une semaine. Depuis hier matin et jusqu'à samedi prochain, les abonnés pourront rapporter tous leurs documents en retard sans payer de pénalité. Qu'ils les aient gardés une journée, une semaine ou un an de plus que la limite prévue, toutes les amendes qui sont associées à ces documents se volatiliseront à la seule condition qu'ils soient rendus en bon état.

 

Geneviève Gagnon est ravie de la mesure. «Si cela permet de faire en sorte que les gens rapportent des documents qu'ils gardent chez eux pour ne pas payer d'amende, ce sera génial. Ça me frustre quand je ne peux pas emprunter un livre parce qu'il a été perdu ou qu'il n'a pas été rapporté», lance la jeune femme devant l'entrée de la bibliothèque, au coin du boulevard De Maisonneuve et de la rue Berri. Elle traîne un gros sac de livres sous le bras. «Je me mets systématiquement une note sur mon frigo pour ne pas oublier de les rapporter et ça marche. Je n'ai jamais payé un rond.»

La BAnQ n'a pas évalué le nombre de documents qu'elle espère retrouver cette semaine, mais la mesure risque de soulever beaucoup d'enthousiasme. Ses 293 121 abonnés ne respectent pas aussi scrupuleusement les règles que Geneviève Gagnon, tant s'en faut. L'an passé, 7247 documents ont disparu des rayons, soit parce qu'ils n'ont jamais été rapportés, soit parce qu'ils l'ont été dans un état lamentable. Et au 1er mai, 11 479 abonnés traînaient dans leur dossier des pénalités de plus de 20$ et n'avaient plus la permission d'emporter des documents à la maison.

Jean-Philippe Grenier, 25 ans, se classe régulièrement dans cette catégorie. «Mon abonnement me coûte cher, vraiment cher! lance-t-il avec le sourire. Deux, trois fois par année, j'en suis quitte pour une amende de plus de 20$!» Encore le mois dernier, il a déboursé 28$. «J'oublie tout le temps de rapporter mes livres. J'en prends trop et je n'ai pas le temps de les lire dans les délais prévus.»

«Ils doivent avoir vraiment du mal à récupérer les livres en retard s'ils ont besoin de faire une amnistie d'une semaine», renchérit un autre abonné, Denis Binet. La BAnQ envisage justement de resserrer certains règlements d'emprunt et pourrait abaisser le fameux plafond de 20$ afin d'inciter les lecteurs à ne pas traîner de trop lourdes amendes à leur dossier.

Entre le 1er avril 2007 et le 31 mars 2008, 4 619 302 documents ont été empruntés à la BAnQ, qui a perçu 659 416,27$ en frais de retard.