Chaque mois, Québec verse environ 5 millions en trop à des bénéficiaires de l'aide sociale qui ont fait de fausses déclarations.

Pour l'année 2008-2009, on parle de 50 millions versés à des fraudeurs, une somme qui, si on ajoute l'argent versé en trop par erreur et l'aide conditionnelle à récupérer, dépasse les 100 millions par année.

Pour l'année financière qui s'est terminée fin mars, Québec a décrété 34 millions de radiation - de l'argent qu'on ne croit pas pouvoir récupérer, indiquent les dernières statistiques sur les «comptes à recevoir» du ministère de l'Emploi. Pour l'année précédente, c'est 40 millions qu'on a ainsi radiés, somme que l'on doit mettre dans son contexte - pour l'année qui se termine, Emploi Québec a versé en moyenne 233 millions, chaque mois, aux bénéficiaires de l'aide en dernier recours.

Obtenues en vertu de la Loi sur l'accès à l'information gouvernementale, les statistiques montrent un rebond dans le nombre des assistés sociaux, conséquence probable de la récession qui a débuté l'automne dernier. Après 335 000 ménages en moyenne en 2007-2008, le rôle de l'aide sociale avait diminué à 326 000 à l'automne 2008, mais a rebondi à 334 000 au printemps. Le nombre des prestataires avait diminué à 479 000 l'été dernier, mais a remonté à 484 000 ce printemps.

Pour le ministre responsable de l'Emploi, Sam Hamad, «il y a une petite augmentation, mais il y a tellement d'entrées et de sorties à l'aide sociale qu'il faut attendre quelques mois avant de tirer des conclusions quant à une augmentation du nombre de bénéficiaires».

La tension monte

Pour 2008, les documents d'Emploi Québec recensent aussi 526 «événements déclarés», des incidents où les agents d'aide sociale ont été victimes de violence verbale, de menace ou même de voies de fait. Cette fois, M. Hamad explique que les statistiques alarmantes viennent en partie de l'intégration des bureaux de la Ville de Montréal aux statistiques provinciales.

La recension relève que sur les 526 cas, 96 viennent des CLE (centres locaux d'emploi) de Montréal, dont 24 de la banlieue et 72 de l'île de Montréal. Aussi, 111 incidents sont survenus au centre de recouvrement - chargé de récupérer les sommes versées en trop, ou d'exiger le remboursement des faussaires.

La tension monte dans les CLE: en 2005 ou en 2006, on répertoriait environ 140 cas de menaces proférées par des bénéficiaires mécontents, tandis qu'en 2008, le nombre de cas a grimpé à 169. Aussi, des «propos injurieux» - monnaie courante dans les CLE - ont été proférés à 296 occasions en 2006, et à 364 occasions l'an dernier.

Les cas de vandalisme ont aussi augmenté : il y a trois ans, il s'en comptait une quinzaine, tandis qu'on en était à 19 l'an dernier. Dans 16 cas, les agents d'aide sociale ont dû utiliser des mesures préventives - les boutons d'urgence dans les salles d'entrevue, notamment. Dans 16 cas aussi, il y a eu des voies de fait à l'endroit des fonctionnaires.

«Beaucoup de cas viennent de Montréal», observe le ministre Hamad. Au surplus, quand on décortique les chiffres, on constate que, dans beaucoup de cas, on parle de violence verbale.

«S'il y a 500 incidents, il ne faut pas oublier qu'il y a 300 000 visites dans les CLE. Ces incidents ne sont pas acceptables, mais il faut juger ces cas malheureux dans le contexte de la clientèle.

«S'il y a 16 cas de violence (physique), c'est autant de cas de trop», insiste le ministre Hamad.

- Avec la collaboration de William Leclerc