Le Québec demeure la province où le taux de suicide des détenus est le plus élevé, révèle une récente étude du ministère de la Sécurité publique. Même si la moyenne annuelle a diminué de moitié de 2003 à 2008, par rapport aux cinq années précédentes, la situation «semble peu reluisante», peut-on lire dans le rapport.

En 2004-2005, le taux de suicide était de 15 pour 10 000 détenus dans les établissements provinciaux au Québec, contre quatre dans les autres provinces et huit dans les pénitenciers fédéraux. Des 130 suicides survenus dans les pénitenciers fédéraux de 1992 à 2000, 55 (42 %) étaient survenus au Québec.

 

«Ces données confirment sans équivoque le fait que les hommes au Québec, tant dans la population que dans les établissements fédéraux et provinciaux, se suicident davantage que ceux des autres provinces canadiennes», écrivent les auteurs de l'étude, Pierre Lalande et Guy Giguère.

Mais la moyenne annuelle de suicides dans les établissements provinciaux du Québec est passée de 12,7, pour la période de 1997 à 2002, à 6,2 par année, pour la période de 2003 à 2008.

«Il est encore trop tôt pour parler d'une nette tendance à la baisse (...) mais il n'en demeure pas moins que les Services correctionnels ont implanté un programme de prévention du suicide», écrivent les auteurs, ajoutant que le ministère de la Sécurité publique a aussi inclus cette problématique dans son Plan stratégique.

Depuis mars 2005, toute tentative de suicide doit être signalée. En 2005-2006, 16 tentatives ont été recensées, dont seulement deux faites par des femmes. L'année suivante, on en dénombrait 21, puis 13 en 2007-2008, donc un cas féminin. Les moyens utilisés ont été la strangulation ou la lacération.

L'étude souligne qu'aucun cas d'intoxication n'est recensé. Selon les auteurs, «le mode de collecte de données concernant les tentatives de suicide doit être revu», car les données actuelles sont «peu fiables». «Il sera certainement important d'être plus vigilant dans la collecte des données afin d'améliorer la prévention du suicide et de suivre l'évolution des tentatives.»

Les auteurs se sont penchés sur 63 des 65 suicides survenus dans les établissements de détention du Québec du 1er janvier 2001 au 31 décembre 2006. Aucun n'a été commis par une femme. Dans tous les cas, le moyen utilisé était la pendaison.

Si 56 % des prisonniers qui se sont enlevé la vie étaient en attente de procès, 44 % étaient condamnés, alors que neuf personnes sur 10 en étaient au moins à leur deuxième expérience d'incarcération.

Les problèmes de consommation d'alcool ou de drogue touchaient 75 % des personnes suicidées, «ce qui mérite une attention particulière», disent les auteurs. Et si la moitié des personnes avaient des problèmes de violence et de santé mentale, au moins six sur 10 avaient des antécédents suicidaires.

L'étude revient sur les «éléments clés» de la prévention selon l'Organisation mondiale de la santé, soit la formation du personnel par rapport au suicide, le dépistage du risque chez les détenus, l'observation et la gestion du suivi.

Pour Pierre Lalande et Guy Giguère, le personnel des pénitenciers doit «toujours garder à l'esprit que le suicide d'un détenu ne doit pas être interprété comme étant le résultat d'une simple fatalité».