Les derniers accommodements raisonnables recommandés par la Commission des droits de la personne - qui préconise par exemple le remplacement chaque vendredi d'un enseignant réclamant un congé hebdomadaire pour aller prier - font sursauter lobbys et syndicats. D'une même voix, ils réclament des balises claires du gouvernement Charest.

Réagissant aux avis de la Commission des droits de la personne rendus publics par La Presse hier, la présidente de la CSN, Claudette Carbonneau, a déclaré qu'«il y a des limites à gérer ça à la pièce».

Pour elle, le gouvernement Charest devra une fois pour toutes faire preuve de leadership en réaffirmant certaines valeurs fondamentales et en permettant à la société de faire un vrai débat sur le type de laïcité à préconiser au Québec.

Le vacuum actuel fait en sorte que les gens se braquent plus qu'autre chose. «L'ouverture à l'autre se développe beaucoup mieux quand on sait où on s'en va avec certaines valeurs fondamentales», croit-elle.

Sur la question des congés supplémentaires à octroyer au besoin pour des motifs religieux, Réjean Parent, président de la Centrale des syndicats du Québec (qui représente notamment des enseignants) signale que ces demandes sont rares, mais qu'elles arrivent à un moment où le contexte s'y prête moins que jamais. «Ces dernières années, nous avons eu beaucoup de demandes de gens qui voulaient travailler à temps partiel. On a donné pas mal de congés, mais là, on le fait moins. Ça se heurte à la difficulté de recrutement. Les banques de suppléants sont très limitées.»

Josée Bouchard, présidente de la Fédération des commissions scolaires, croit aussi que l'idée d'octroyer des congés hebdomadaires à des fins religieuses «n'a aucun sens». «Non seulement cela pose des contraintes administratives et financières exagérées mais cela nuit à l'élève. Dans mon discours de début d'année, j'ai justement insisté sur l'importance d'une présence continue en classe.»

Pierre St-Germain, président de la Fédération autonome de l'enseignement (qui représente les enseignants de Montréal, Laval et des environs) rappelle pour sa part que les organismes sont liés par les décisions de la Cour suprême. Cela veut dire que d'accord ou pas avec l'idée de congés à des fins religieuses, il faut a priori y consentir. «Cela étant dit, comme l'ont bien dit les tribunaux, cela peut varier dans le temps. Un accommodement qui était raisonnable peut ne plus le devenir plus tard dépendamment du contexte, économique ou autre.»

Christiane Pelchat, présidente du Conseil du statut de la femme, signale que les dernières recommandations de la Commission des droits de la personne illustrent bien à quel point l'absence de balises entraîne une vraie «pizza d'accommodements».

Pour elle, ce n'est pas le mandat de la Commission de distribuer ses recommandations à la pièce aux employeurs ; il devrait revenir au gouvernement de mettre en place des politiques claires.

Alexa Conradi, présidente de la Fédération des femmes du Québec, croit que l'opposition des Québécois à tout accommodement - très manifeste dans le sondage publié par La Presse hier - s'explique par le fait que les citoyens se sentent très peu écoutés.

Mme Conradi elle-même en a particulièrement contre tout accommodement qui nuit à l'égalité entre les hommes et les femmes. À son avis, un homme devrait être capable de supporter d'être quelques minutes dans une voiture avec une examinatrice de la Société d'assurance automobile du Québec. Selon elle, ça a bien moins à voir avec des considérations religieuses qu'avec la difficulté qu'ont certains de voir une femme en situation d'autorité.

À l'Assemblée nationale, hier, Pauline Marois a réclamé de Jean Charest qu'il réaffirme certains droits, tel celui de l'égalité entre les hommes et les femmes.