Deux ans après les Jeux olympiques de Pékin, la Chine accueille le monde à Shanghai. La cérémonie d'ouverture de l'Exposition universelle 2010 a eu lieu hier soir en présence du président chinois Hu Jintao et de dirigeants étrangers, dont le président français Nicolas Sarkozy, mais c'est aujourd'hui qu'elle ouvre officiellement ses portes. Pour s'assurer de faire sa marque parmi les 189 pays participants, le Canada a misé sur le Cirque du Soleil.

On l'a dit: l'Exposition universelle de Shanghai sera la plus grande de l'histoire et battra toutes sortes de records. On en a eu la première preuve, hier soir, lors de la cérémonie d'ouverture de l'Expo 2010 marquée par un festival pyrotechnique plus impressionnant que celui des Jeux de Pékin, rapportent les agences de presse.

Shanghai accueille 189 pays participants, plus que toute autre exposition universelle précédente, et compte recevoir d'ici le 31 octobre 70 millions de visiteurs, dont 5 millions d'étrangers. Du jamais vu. Et on n'a pas encore parlé des coûts de la manifestation, qui tournent autour des 6 milliards de dollars. Plus encore, en tenant compte de la mise à niveau et de la construction des infrastructures à Shanghai, cette somme devrait avoisiner les 60 milliards de dollars, autre record.

Quand, en janvier 2008, le gouvernement canadien a annoncé qu'il s'associait pour la première fois avec le Cirque du Soleil pour l'Exposition de Shanghai, ce n'était pas pour son expertise dans le spectacle circassien. Ottawa a confié au Cirque un mandat d'un tout autre ordre: la conception du pavillon du Canada et la mise sur pied de son programme culturel canadien pour les six mois de l'Expo. «Le Cirque a quand même construit plusieurs théâtres permanents dans le monde, à Las Vegas, Macao ou au Japon, et qui disposaient de budgets importants», fait valoir aujourd'hui Jean Héon, du ministère du Patrimoine canadien.

Le Canada ne voulait surtout pas passer inaperçu à ce rendez-vous planétaire important. Le budget total de la présence canadienne à l'Expo 2010 est de 58 millions de dollars, dont 28 pour le pavillon lui-même, et le reste pour les expositions à l'intérieur du pavillon et la programmation culturelle.

«À Hanovre (en 2000) et à Haichi (en 2005), le gouvernement canadien a choisi des moyens relativement restreints en matière de visibilité: on a utilisé une construction déjà faite et on y a superposé des bannières avec des feuilles d'érable, rappelle Johnny Boivin, directeur de création du Cirque qui a conçu le pavillon du Canada à Shanghai. Cette fois, il y avait vraiment une volonté de faire un geste plus radical, d'abord en se construisant un pavillon, puis en confiant au Cirque du Soleil le mandat d'articuler l'ensemble du projet.»

Au cours des 6 prochains mois, le pavillon canadien s'attend à recevoir de 5 à 5,5 millions de visiteurs, à raison de 30 000 par jour. Lors d'une journée de préouverture tout récemment, la queue faisait plusieurs fois le tour du pavillon, a appris Johnny Boivin.

«Shanghai est pour nous une vitrine incroyable sur l'Asie, reconnaît le président du Cirque du Soleil, Daniel Lamarre. Le pavillon n'est même pas ouvert que déjà, plusieurs promoteurs chinois nous ont joints. Le Cirque est allé une fois à Shanghai, mais le pavillon canadien sera un beau tremplin pour accentuer notre présence en Chine.»

Un geste architectural

Titulaire d'une maîtrise en philosophie, Johnny Boivin baigne dans le spectacle depuis longtemps. D'abord assistant du scénographe Michel Crète pour des spectacles comme Mystère et O, il a par la suite travaillé à des projets liés à l'architecture pour Hong Kong, Londres et le Casino que la Ville de Montréal voulait installer au bassin Peel. C'est lui qui a conçu le théâtre où le Cirque présente son nouveau spectacle consacré à Elvis Presley, à Las Vegas. Pour le pavillon canadien, il a travaillé avec la firme d'architectes Saia Barbarese Topouzanov, la boîte de production Félix et Paul et SNC-Lavalin.

«Le pavillon doit évidemment représenter le Canada, explique M. Boivin. Notre geste architectural a été de prendre la bande au sud du pays où vit la majorité de la population et de l'enrouler autour de la place publique, un peu comme deux bras qui enlacent quelqu'un qu'ils chérissent. L'extérieur est fait de cèdre rouge canadien et, comme je suis un gars de spectacle, j'ai traité la façade comme un décor: le jour, on voit une masse de bois très impressionnante mais opaque, tandis que le soir, quand on l'éclaire par l'arrière, le bâtiment devient transparent et léger.»

Le pavillon canadien accueille aujourd'hui ses premiers visiteurs, mais M. Boivin y retournera dans quelques jours pour mettre la touche finale à une installation sculpturale dans la cour intérieure. «C'est un élément métallique qui évoque des formes urbaines, réalisé avec la société minière Tech de Vancouver, avec une vidéo qui explique de façon très métaphorique le rôle du métal dans la construction des villes meilleures.»

La signature que l'on associe habituellement au Cirque du Soleil sera accessoire dans le pavillon: des artistes chinois chargés d'interagir avec le public dans la file d'attente seront habillés par Lucien Bernèche, concepteur de costumes habitué des manifestations spéciales du Cirque.