La première fois que James Ambler, un ancien pilote de l'Armée de l'air, a visité les Pays-Bas, il ne pouvait comprendre pourquoi les Néerlandais accueillaient à bras ouverts les Anciens combattants.

Aujourd'hui âgé de 87 ans, M. Ambler ne se souvenait que des mares de sang et des dégâts engendrés par les batailles meurtrières de la Seconde Guerre mondiale.

Il a donc demandé à un Néerlandais pourquoi ce peuple affichait autant de gratitude, malgré un passé si triste.

«Je lui ai dit que nous n'avions rien amené d'autre à ce coin de pays que la mort et la destruction, et que je ne comprenais pas comment ses citoyens pouvaient nous accueillir de pareille façon», a relaté M. Ambler.

«Il s'est tourné vers moi et m'a dit : «Vous nous avez donné la liberté. Si vous n'avez pas perdu votre liberté, vous ne comprenez pas. Nous comprenons.»'

M. Ambler est l'un des dix Anciens combattants invités au sein d'une délégation canadienne qui s'envolera vers les Pays-Bas dimanche, afin de commémorer le 65e anniversaire de la libération du pays et le jour de la Victoire en Europe, à compter de lundi.

La délégation canadienne, que dirigera le ministre des Anciens combattants, Jean-Pierre Blackburn, réunira aussi des représentants d'organisations d'anciens combattants, un vétéran de l'ère moderne, des jeunes et des parlementaires.

En plus des délégués officiels du Canada, plus de 2000 élèves, enseignants et administrateurs de près de 85 écoles au pays feront eux aussi le voyage aux Pays-Bas, où ils assisteront aux activités organisées tout au long de la semaine, jusqu'à celle du 8 mai en commémoration du jour de la Victoire en Europe et de la fin de la Seconde Guerre mondiale en Europe.

Il ne s'agira pas d'une visite inaugurale. Il y a longtemps que les Canadiens sont reçus en terre néerlandaise et d'anciens combattants - comme M. Ambler - sont retournés en de nombreuses occasions dans le pays où quelque 7600 soldats canadiens sont morts au combat.

À chaque fois, les délégués sont émus de l'accueil qui leur est réservé.

«Ils sont tellement reconnaissants du fait que les Canadiens les ont libérés, qu'ils veulent vous serrer la main, vous embrasser et vous dire merci et encore merci», raconte Gilles Turcot, commandant du Royal 22e Régiment pendant la guerre.

Âgé de 92 ans, M. Turcot rend régulièrement hommage aux soldats qui évoluaient sous ses ordres, qui ont perdu la vie et qui sont enterrés là-bas.

Il a multitudes d'histoires à raconter sur leurs batailles - certaines couronnées de succès, d'autres non - et des difficultés qu'ils ont dû surmonter.

«Les gens là-bas ont beaucoup souffert, rappelle-t-il. Ils étaient affamés. À un certain moment, il y a eu une trêve de deux jours pour permettre aux convois de nourriture de passer. Il n'y en avait pas assez pour tout le monde, alors ils ont nourri seulement les enfants.»

Lors de cet éprouvant hiver de 1944-1945, la famine a balayé les Pays-Bas, forçant ses résidents à manger des bulbes de tulipe pour survivre.

Les Forces canadiennes ont stoppé leur avancée face aux Nazis afin de négocier une trêve qui leur a permis de larguer de la nourriture à des Néerlandais au bord du désespoir.

En huit mois à peine - de septembre 1944 à avril 1945 - les actions du Canada ont permis de forger de profonds liens entre les deux pays, des liens qui persistent 65 ans plus tard.

Des milliers d'écoliers néerlandais se recueillent, encore aujourd'hui, sur les pierres tombales des soldats morts au combat. Et tous les ans, la famille royale des Pays-Bas achemine 10 000 bulbes de tulipes à Ottawa, en guise de gratitude pour l'engagement du Canada, mais aussi pour le remercier d'avoir accueilli la princesse Juliana et ses deux filles pendant la guerre.

La princesse Margriet est d'ailleurs née dans un hôpital d'Ottawa, en 1943, et elle accueillera la délégation canadienne aux côtés de la reine Beatrix, la semaine prochaine avant sa visite au Canada qui aura lieu du 10 au 16 mai. En compagnie de son époux Pieter van Vollenhoven, elle se rendra à Calgary et à Ottawa pour participer aux cérémonies célébrant le 65e anniversaire de la libération des Pays-Bas.

Nommé en janvier dernier à titre de ministre des Anciens combattants, M. Blackburn compte bien écouter très attentivement les histoires qui lui seront racontées pendant ce voyage.

«C'est un privilège et un honneur que de diriger cette délégation. Ils (les Néerlandais) sont très reconnaissants de ce que nous avons fait.»