Après des baisses notables dans les dernières années, le nombre de plaintes pour agression sexuelle est en hausse depuis un an. Le Service de police de la Ville de Montréal admet qu'il n'a pas le choix: il doit fixer des priorités.

Depuis juin 2009, le nombre de plaintes formulées par des adultes est passé de 617 à 711, une hausse de 15%, explique le commandant Jérôme Morissette, spécialisé dans les dossiers d'agressions sexuelles. Le nombre de plaintes formulées au nom d'enfants a pour sa part bondi de 35% (de 135 à 183).

 

«Or, chaque enquête demande de deux semaines à six mois de travail», explique le commandant Clément Rose du SPVM.

Au poste de police, Caroline (voir texte principal) s'est fait dire que, s'il y a de longs délais dans le traitement des plaintes, c'est que les dossiers d'agressions sexuelles ne sont plus prioritaires comme avant.

En entrevue, le commandant Clément Rose, spécialisé dans les homicides, jure que ce n'est pas le cas. Cependant, poursuit-il, un réaménagement est survenu dans les structures du SPVM. Les dossiers d'agressions sexuelles, traités jusqu'ici par des enquêteurs qui s'y consacraient exclusivement, ont depuis peu été confiés à la section des homicides. Une fois que les enquêteurs aux homicides auront reçu leur formation sur les agressions sexuelles, ils pourront traiter les deux types de plaintes.

Aller au plus urgent

Le commandant Rose assure que cette fusion des services ne signifie en rien que l'on accorde moins d'importance aux agressions sexuelles.

Il reste que la quantité de dossiers qui s'empilent sur les bureaux des enquêteurs allonge les délais. «Il faut tout gérer, il faut gérer la femme qui s'est fait agresser en 1972, il faut gérer le vol de banque, il faut gérer l'enfant de 5 ans (qui se fait agresser), il faut gérer l'homicide qui vient de se produire...» explique M. Rose.

Nécessairement, il faut aller au plus urgent, poursuit-il. Les enfants qui sont en train de subir des agressions passent évidemment avant les agressions du passé.

M. Rose juge malgré tout inacceptable qu'une plaignante soit laissée dans le vague après avoir porté plainte. Les policiers doivent la rappeler et la tenir au courant de l'évolution de son dossier, dit-il. Le commandant croit que le remue-ménage en cours dans les structures pourrait être à l'origine de certains malentendus.

La campagne publicitaire n'est-elle pas venue au mauvais moment, à l'heure où le SPVM est en pleine réorganisation? Le commandant Morissette répond que non: toute campagne incitant les gens à dénoncer leur agresseur est la bienvenue, en tout temps.

Les deux commandants doutent cependant que la campagne soit à l'origine de la recrudescence du nombre de plaintes pour agression sexuelle, pas plus qu'ils n'attribuent les hausses à l'«effet Nathalie Simard».

«C'est bien personnel, avance le commandant Rose, mais j'ai plutôt l'impression que c'est parce que les gens ont moins de préjugés. Peut-être ont-ils moins peur aujourd'hui de se faire juger par leurs proches.»