Il y a cinq ans, les leaders du G8 ont pris un engagement historique: celui de doubler l'aide internationale consacrée à l'Afrique... d'ici à la fin de 2010.

À minuit moins cinq, il manque toujours 18 milliards de dollars pour respecter la promesse d'aide au développement faite en 2005 par les chefs d'État et de gouvernement les plus influents de la planète. L'engagement n'a été rempli qu'à 61%, selon l'Organisation de coopération et de développement économique (OCDE).

 

Pis encore, à moins de deux semaines de la tenue du sommet du G8 à Muskoka, en Ontario, les premiers échos ayant filtré indiquent que la déclaration conjointe des leaders pourrait ne pas faire mention de l'engagement pris à Gleneagles, en Écosse, qui risquerait ainsi de sombrer dans l'oubli.

Établir les priorités

«Il y a un manque de volonté politique, déplore Robert Fox, directeur général d'Oxfam Canada. Pour sauver les banques et renflouer les économies occidentales, la planète s'est mobilisée et a déboursé 17 000 milliards de dollars en plans de relance et autres initiatives.»

«Qu'est-ce que ça démontre? Que lorsqu'on veut, on peut trouver les ressources, ajoute-t-il. Cette somme, c'est 1000 fois plus que ce qui manque à cet engagement. Personne ne peut dire qu'on n'avait pas l'argent. Ce n'est tout simplement pas vrai. La question est de savoir ce qu'on choisit de faire avec l'argent.»

Depuis plus de 30 ans, les leaders les plus influents du monde se rencontrent une fois l'an et multiplient les promesses, souvent à l'égard des pays les plus pauvres de la planète. Si les engagements ne sont pas toujours remplis, c'est surtout en raison d'un manque de leadership, estime Ted Schrecker, professeur à la faculté de médecine de l'Université d'Ottawa, spécialiste en santé internationale et en économie mondiale.

«Il y a absence de sentiment de solidarité internationale entre les pays riches et les plus pauvres, explique-t-il. Personne ne veut comparer la somme que le Canada débourse en aide internationale à l'Afrique avec, par exemple, les dépenses qu'il fait en équipements militaires et de combat.»

Quelques résultats

Avec les années, certes, certains engagements des pays du G8 ont donné des résultats. C'est le cas notamment du Fonds mondial de lutte contre le VIH et le sida, le paludisme et la tuberculose, créé en 2001 lors du sommet de Gênes, en Italie. Neuf ans plus tard, beaucoup de progrès a été accompli dans le traitement et la prévention du VIH-sida, soutiennent les experts, qui craignent maintenant que le financement de ces projets soit réduit ou maintenu au niveau actuel. Le Canada a notamment annoncé dans son dernier budget que l'aide internationale serait gelée à partir de l'année prochaine. «Les besoins sont tels qu'il faudrait que les investissements continuent d'augmenter pendant encore un temps», dit le professeur Schrecker.

Certains engagements pris pendant des sommets du G8 peuvent aussi disparaître subitement de l'écran radar. En 2008, à Hokkaido, au Japon, les grands leaders mondiaux se sont entendus pour renforcer les systèmes de soins de santé dans les pays en développement. «L'engagement a été mentionné à L'Aquila en 2009, mais il est tout simplement absent de l'agenda cette année», déplore M. Schrecker.

Quant aux changements climatiques, la question a été au programme des sommets du G8 depuis 1989, mais pas cette année, note Robert Fox, d'Oxfam Canada. En 2009, en Italie, les leaders ont convenu de limiter la hausse des températures mondiales à 2 ºC - un engagement qui a été repris à la conférence de Copenhague.

«Avec les mesures et les engagements pris pour réduire les émissions de gaz à effet de serre, actuellement, les pays ne respecteront pas l'objectif de 2 ºC», soutient M. Fox.

À ce jour, les puissances mondiales et émergentes n'ont pas non plus respecté l'engagement, pris au sommet du G20 de Pittsburgh l'an dernier, de mettre fin aux subventions aux combustibles fossiles. Pour le Canada seulement, ce sont 2 milliards de dollars qui y sont engloutis chaque année. Pour les experts en aide internationale et les environnementalistes, cet argent pourrait notamment servir à aider les pays en développement à s'adapter aux changements climatiques.

 

LES VILLES HÔTES DES G8

> 2001 Gênes (Italie)

> 2002 Kananaskis (Alberta, Canada)

> 2003 Évian (France)

> 2004 Sea Island (Géorgie, États-Unis)

> 2005 Gleneagles (Écosse, Royaume-Uni)

> 2006 Saint-Pétersbourg (Russie)

> 2007 Heiligendamm (Allemagne)

> 2008 Hokkaido (Japon)

> 2009 L'Aquila (Italie)

> 2010 Muskoka (Ontario, Canada)