Linda Spear est devenue samedi après-midi la première femme prêtre au Québec. L'enseignante à la retraite a été ordonnée prêtre lors d'une cérémonie tenue à Sutton, sa ville de résidence. Officiée par le Roman Catholic Women Priest (RCWP), une organisation non reconnue par l'Église, cette ordination n'a cependant aucune valeur aux yeux du Vatican.

Lors d'une entrevue téléphonique accordée à Cyberpresse, Linda Spear a dit accomplir cette démarche pour mettre en lumière le manque d'égalité entre les hommes et les femmes au sein de l'Église. «C'est très important d'envoyer le message que la femme est l'égal de l'homme, surtout dans le tiers-monde, a-t-elle déclaré. L'Église catholique envoie un message très négatif en Afrique et dans les sociétés patriarcales, où la femme est dévaluée. Pour moi, c'est une façon de dire que les femmes ont la même valeur que les hommes et doivent être traitées avec respect. Il y a tant de violence envers les femmes dans le monde.»

Ayant reçu une éducation catholique, Linda Spear dit avoir été attirée dès son plus jeune âge vers la prêtrise. Née au Manitoba, elle a résidé plusieurs années à Montréal avant de s'établir à Sutton. Elle a notamment étudié l'histoire de l'Église et la théologie. «Pour moi, c'est une chance de réaliser un rêve», a-t-elle souligné.

Excommunication

En accédant ainsi à la prêtrise, Linda Spear sait qu'elle risque l'excommunication. Fermement opposé à la démarche, le Vatican menace d'excommunication toute femme qui occupe la fonction de prêtre, réservée aux hommes.

«Je serai excommuniée, je m'attends à ça, a confié Mme Spear. Je trouve ça ridicule. C'est un abus de pouvoir.» Elle a ajouté que le Vatican nuit à sa crédibilité en accusant les femmes prêtes d'un délit comparable à la pédophilie. Le Saint-Siège a rappelé en juillet dernier que l'ordination des femmes était un «delictum gravius» -un crime grave- au même titre que la pédophilie.

Mme Spear dit n'avoir jusqu'à maintenant été contactée par aucun membre du clergé. Le vicaire général du Diocèse de Saint-Hyacinthe n'a pas rappelé Cyberpresse.

La cérémonie d'ordination s'est déroulée à l'église Grace anglicane de Sutton. Une centaine de personnes y ont assisté, dont Marie Bouclin, première Ontarienne et deuxième Canadienne ordonnée prêtre et coordonnatrice du programme d'ordination pour l'est du Canada de la RCWP.

Un geste symbolique?

Linda Spear soutient que la cérémonie n'est pas que symbolique. «C'est une vrai ordination!» lance-t-elle. Mais pas aux yeux de l'Église, puisque celle-ci n'est pas réalisée par un évêque catholique. Au terme de la cérémonie, elle pourra administrer les sacrements et présider des mariages et des funérailles, lesquels ne seront toutefois pas reconnus par l'Église catholique. Les mariages qu'elle célébrera seront cependant reconnus sur le plan civil.

Mme Spear ne pourra pas officier dans une église. Elle explique que si elle le faisait, l'église risquerait d'être fermée. «Je ne veux pas qu'à cause de moi, les gens perdent leur église. Ce n'est pas mon intention.» Elle précise qu'elle n'a pas de lieu de culte désignée et qu'elle peut se déplacer à la demande des gens.

Le Roman Catholic Women Priests est un groupe fondé en Allemagne en 2001. Il a des ramifications en Europe, aux États-Unis et au Canada. Il compte maintenant sept femmes prêtres au Canada et plus d'une centaine aux États-Unis et en Europe.