Les syndicats déclarent la guerre à la droite. Ils fondent l'Alliance sociale, pour répliquer coup pour coup à l'intoxication dont est victime la population, selon eux.

Tous les chefs des principaux syndicats du Québec étaient réunis vendredi matin, dans la Vieille-Capitale, pour faire une sortie qui prenait des allures de front commun. Ils avaient aussi rallié les fédérations étudiantes universitaire et collégiale. Tous les coalisés veulent d'abord prendre d'assaut les consultations prébudgétaires du gouvernement, pour infléchir ses choix.

Selon le président de la Fédération des travailleurs du Québec (FTQ), Michel Arsenault, il faut défendre les programmes sociaux contre la privatisation.

«Ça, c'est la différence entre les êtres humains et les animaux, a-t-il déclaré en conférence se presse. Les animaux, quand il y en a un qui vieillit, ils le laissent mourir et ils le mangent entre eux. Nous, il faut s'occuper de notre monde, de nos jeunes, de nos étudiants, de nos vieillards.»

Les syndicats veulent ainsi s'opposer au nouveau groupe Réseau Liberté-Québec, qui a pris son envol il y a quelques semaines, ainsi qu'au mouvement politique qui semble se dessiner autour des anciens ministres péquistes François Legault et Joseph Facal.

«Le Québec a besoin de bien d'autres choses que d'un "Tea Party" québécois, a commenté la dirigeante de la Confédération des syndicats nationaux (CSN), Claudette Carbonneau. Je pense qu'il a besoin d'un autre Québec et pour ça aussi, on est prêt à se mobiliser et à agir.»

Quant à savoir si cette sortie concertée traduisait la perte d'influence des syndicats, Mme Carbonneau a en quelque sorte reconnu leur vulnérabilité.

«Est-ce qu'on sent qu'on est en perte d'influence? Je vous dis que derrière votre question, il y a au moins la démonstration qu'il y a quelque chose qui ne va pas dans le discours de la droite, parce qu'à les entendre, on est omnipotents.»

La première cible de l'Alliance sociale est le budget déposé par le ministre Raymond Bachand au printemps, a souligné Mme Carbonneau.

«Il constitue une véritable rupture du pacte social qui unissait la population et son gouvernement, a-t-elle soutenu dans une entrevue à La Presse Canadienne. Il y a des remises en question tout à fait fondamentales (dans ce budget).»

Elle reproche en même temps au gouvernement d'être «trop immobile» et «incapable de saisir les vrais enjeux du XXI siècle». Il faut donner un «tour de roue» vers un autre type de développement.

Pour sa part, une des figures de proue du Réseau Liberté-Québec, Joanne Marcotte, se réjouit de pouvoir enfin faire un débat gauche-droite au Québec. Elle a qualifié la nouvelle coalition d'«Alliance syndicale» plutôt qu'«Alliance sociale».

«C'est une réaction qui est très rationnelle: ce sont eux qui ont le plus à perdre quand on veut revoir le modèle québécois, a-t-elle déclaré en entrevue téléphonique. Ils sont déstabilisés, ils n'ont pas l'habitude d'être contestés par un mouvement de droite, donc ils ont peur de perdre leurs acquis.»

Elle leur reproche toutefois de «déguiser» leur discours. Selon elle, il n'est pas progressiste, mais réactionnaire. Elle trouve aussi que leur démarche est carrément «indécente».

«Ils le font (le débat) aux frais des syndiqués et des contribuables, a-t-elle poursuivi. Je pense qu'il faut en appeler aux syndiqués qui ne sont pas d'accord avec ce que font les syndicats. L'argent des syndiqués, c'est pour défendre des employés syndiqués, pas pour faire de la propagande gauchiste et encourager l'immobilisme au Québec.»