La guerre que mène depuis plus de deux ans un site web catholique torontois contre l'organisme Développement et Paix s'intensifie. L'organisme, créé par l'épiscopat canadien pour financer des projets dans le tiers-monde, sera au coeur du congrès Campagne-Québec-Vie en fin de semaine dans la Vieille Capitale.

La décision de l'archevêque d'Ottawa d'annuler l'invitation lancée par Développement et Paix à un jésuite mexicain, au début d'avril, a ravivé les tensions. Le père Luis Arriaga, qui dirige le Centre Prodh à Mexico, est accusé par le site Lifesitenews d'appuyer des groupes faisant la promotion du libre-choix en matière d'avortement. Les allégations de Lifesitenews seront réitérées, dimanche, au congrès de Campagne-Québec-Vie.

L'affaire a fait grand bruit au Québec. À la fin d'avril, le Réseau Culture et Foi a dénoncé la décision de l'archevêque Terrence Prendergast et un prêtre missionnaire a dénoncé Mgr Prendergast dans un bulletin de nouvelles catholique montréalais, Proximo. La Conférence des évêques catholiques du Canada (CECC) a répliqué en attaquant le prêtre cité par Proximo, Claude Lacaille.

Pour compliquer le tout, le Centre Prodh avait en 2009 été blanchi des accusations de Lifesitenews par un rapport de la CECC. Le rapport mentionnait toutefois que l'organisme mexicain, qui milite contre la torture et les emprisonnements abusifs, avait été «imprudent» en participant à une étude sur les droits de l'homme soumise à l'ONU par des ONG mexicains, parmi lesquels se trouvaient des militants pro-choix (l'avortement est illégal au Mexique, sauf à Mexico). Développement et Paix donne environ 30 000$CAN par année au Centre Prodh pour des projets spécifiques, sur un budget total de 21 millions$CAN provenant en grande partie de collectes de fond dans les églises.

«Le père Arriaga ne pouvait pas promettre à Mgr Prendergast que le Centre n'appuyait pas et ne soutenait pas des organismes pro-avortement», explique l'attachée de presse de l'archevêque, Sarah Du Broy. À noter, tant Mgr Prendergast que le père Arriaga sont jésuites.

Le Centre Prodh dans l'embarras

Selon Lifesitenews, le Centre Prodh fait partie des signataires d'une campagne de 2008 contre la recriminalisation de l'avortement dans l'État de Jalisco. En 2007, le Centre Prodh s'est occupé du cas d'une mère-fille de 12 ans de Pachuca à qui la DPJ locale avait interdit de fréquenter l'école et d'avoir un avortement.

Chez Développement et Paix, le directeur, Michael Casey, indique avoir été joint par la CECC, qui lui a indiqué qu'un «cardinal mexicain a fait part de certaines préoccupations au sujet du Centre Prodh». «On ne peut pas appuyer des projets de groupes qui ne sont pas totalement en accord avec l'Église locale. Le rapport de 2009 proposait d'ailleurs de valider nos partenaires avec l'épiscopat local. On est en train de faire ça pour certains groupes, dans divers pays.»

Normand Brault, membre québécois de Développement et Paix, déplore la nécessité de prenre contact avec l'épiscopat local. «Comment voulez-vous que les évêques connaissent tous les ONG?, demande M. Brault. Ça va beaucoup limiter le nombre de projets qu'on peut financer.»