Les femmes prennent de plus en plus les commandes du pays. Élue à la surprise générale à la tête du Parti progressiste-conservateur de l'Alberta, samedi soir, Alison Redford est devenue du même coup la troisième femme à diriger actuellement une province canadienne  une première dans l'histoire du pays.

L'Alberta, la Colombie-Britannique et Terre-Neuve sont maintenant dirigées par une première ministre. En Colombie-Britannique, Christy Clark dirige un gouvernement libéral depuis le printemps dernier, à la suite du départ de Gordon Campbell.

À Terre-Neuve, Kathy Dunderdale a remplacé le bouillant premier ministre Danny Williams en décembre 2010 et elle est en voie de remporter les élections provinciales qui auront lieu dans la province la semaine prochaine.

Une autre femme, Eva Aariak, est la première ministre du territoire du Nunavut depuis novembre 2008.

Fait intéressant, la nouvelle première ministre de l'Alberta doit maintenant se frotter à une autre femme  Danielle Smith, leader de la Wildrose Alliance, une formation politique de droite fondée il y a trois ans qui grimpe dans les sondages.

L'influence des femmes en politique pourrait augmenter d'un autre cran si, comme le laissent entrevoir plusieurs sondages, les électeurs de l'Ontario élisent un premier gouvernement minoritaire depuis 1985 au scrutin de jeudi. Si tel est le cas, la chef du NPD, Andrea Horwarth, pourrait détenir la balance du pouvoir et exiger des concessions au prochain gouvernement, qu'il soit minoritaire libéral ou minoritaire conservateur.

«Les femmes premières ministres font bouger le pays», a affirmé hier Donna Dasko, présidente nationale d'À voix égales, un organisme qui fait la promotion de l'élection de plus de femmes dans tous les ordres de gouvernement.

«Les partis politiques comprennent l'attrait qu'ont les femmes leaders, car elles sont perçues comme étant crédibles, différentes et captivantes dans le climat politique d'aujourd'hui», a ajouté Mme Dasko.

Rita Johnson est devenue la première femme à diriger un gouvernement dans l'histoire du pays quand elle a pris la relève du premier ministre démissionnaire de la Colombie-Britannique, Bill Vander Zalm, en 1991.

À ce jour, une seule femme a été portée au pouvoir par les électeurs, Catherine Callebeck, élue première ministre de l'Île-du-Prince-Édouard, en 1993. Kim Campbell est devenue la première et la seule femme à occuper le poste de premier ministre du Canada, en 1993, en succédant à Brian Mulroney à la tête du Parti progressiste-conservateur. Mais son règne a été de courte durée: à peine cinq mois, les conservateurs étant réduits à deux sièges seulement aux élections de novembre 1993 remportées par les libéraux de Jean Chrétien.

Selon Linda Cardinal, professeure à la Faculté des sciences sociales de l'Université d'Ottawa, l'élection d'une autre femme à la tête d'une province est une bonne nouvelle, mais il reste encore beaucoup de travail à faire pour assurer une meilleure représentation des femmes en politique.

«C'est intéressant de constater que les femmes qui dirigent les gouvernements sont issues de la mouvance conservatrice et on a l'habitude de penser que les mouvances conservatrices ne font pas de place aux femmes. Mais on sent que les grandes transformations sociales comme l'accès des femmes au pouvoir, même les conservateurs ne peuvent les arrêter», a dit Mme Cardinal.

Elle a ajouté que le milieu politique demeure tout de même en retard par rapport à d'autres professions dites libérales, comme l'enseignement, la médecine ou encore le droit. «Les femmes sont très présentes dans ces milieux. Il y a encore des bastions comme le domaine des sciences. Le milieu politique, on a toujours associé cela à un monde d'hommes, mais c'est en train de changer. Cela s'est produit dans les pays scandinaves. La politique est un monde très féminisé», a-t-elle affirmé.

Aux dernières élections fédérales, 78 des 308 députés élus étaient des femmes. Le NPD a fait élire 40 femmes sur 103 députés; le Parti conservateur compte 28 femmes parmi ses 167 élus, le Parti libéral a fait élire 6 femmes et compte 34 députés en tout, tandis que le Bloc québécois a une députée sur 4 élus. La chef du Parti vert, Elizabeth May, a fait son entrée aux Communes aux élections du 2 mai.