Les leaders des peuples autochtones demandent aux Nations unies de dépêcher un rapporteur au Canada afin d'enquêter sur la pauvreté qui afflige leurs communautés, en particulier dans la réserve d'Attawapiskat, et de faire pression sur le gouvernement canadien pour qu'il respecte les traités conclus avec les Premières Nations.

Réunis d'urgence mardi à Ottawa, les leaders autochtones ont aussi adopté une résolution condamnant la décision du gouvernement Harper de mettre la réserve autochtone d'Attawapiskat sous tutelle et donné leur appui sans équivoque à la chef de la réserve, Theresa Spence.

L'état d'urgence a été décrété le 28 octobre dans cette réserve située à quelque 500 kilomètres de Timmins, dans le nord de l'Ontario, alors que des familles doivent s'entasser dans des tentes et des roulottes sans eau courante, sans électricité et sans chauffage en raison d'une grave crise de logement.

Presque de la provocation

Mis dans l'embarras par cette crise humanitaire, le gouvernement Harper a décidé, la semaine dernière, d'imposer la tutelle et d'envoyer un séquestre-administrateur, Jacques Marion, pour examiner les états financiers de la réserve. Le premier ministre Stephen Harper a dit ne pas comprendre pourquoi les 2000 habitants de cette réserve vivent dans des conditions insalubres malgré des investissements de 90 millions de dollars d'Ottawa depuis 2006.

Mais les dirigeants de la réserve ont expulsé M. Marion et les fonctionnaires du ministère des Affaires indiennes, lundi, en soutenant que cette décision «paternaliste» était injustifiée et frisait la provocation.

«Il faut dire au gouvernement fédéral qu'assez, c'est assez. Au lieu de travailler avec nous, le gouvernement a décidé de nous blâmer et de nous imposer la tutelle. Nous n'avons pas eu de réponse du gouvernement quand nous avons déclaré l'état d'urgence à deux reprises. Nous avons dû demander à la Croix-Rouge d'intervenir pour nous aider», a affirmé la chef Theresa Spence en refoulant des larmes.

Le chef des Premières Nations, Shawn Atleo, a aussi donné son appui à la chef Spence. «La situation à Attawapiskat n'est pas unique au pays. Les Canadiens ont vu la semaine dernière des conditions de vie difficiles que nous voyons tous les jours», a-t-il affirmé dans un discours devant les chefs des Premières Nations réunis en assemblée extraordinaire.

Le ministre des Affaires indiennes, John Duncan, a rencontré la chef Theresa Spence et le Grand Chet Stan Louttit lundi, à Ottawa. Il a déploré la décision du conseil de bande de la réserve d'expulser le séquestre-administrateur Jacques Marion. Mais il a précisé que l'argent déboursé par le ministère des Affaires indiennes pour la réserve demeurera sous le contrôle de M. Marion jusqu'à nouvel ordre.

Le ton monte

Aux Communes, mardi, le ton a monté d'un cran entre le gouvernement Harper et les leaders de cette réserve quand le secrétaire parlementaire de M. Duncan, Greg Rickford, a fait savoir que les investissements nécessaires pour régler cette crise n'auront pas lieu tant que le séquestre-administrateur sera persona non grata à Attawapiskat.

«Nous exhortons le conseil de bande à faire partie de la solution. Il est évident que, malgré des investissements importants, les conditions de vie demeurent inadéquates. [...] Empêcher le séquestre-administrateur de travailler dans la communauté ne fera que retarder la construction de logements pour les résidants qui en ont grandement besoin», a dit M. Rickford.