L'estimation des coûts de réfection de la centrale nucléaire Gentilly-2 aurait déjà augmenté de plus d'un milliard de dollars. Et même si le gouvernement n'a pas encore pris de décision, Hydro-Québec aurait déjà dépensé près de 800 millions dans ces travaux, a appris La Presse.

Selon une source bien renseignée, l'estimation provisoire des coûts a déjà grimpé de 1,9 milliard en 2008 à plus de 3 milliards. Hydro-Québec n'a pas voulu confirmer ou infirmer la nouvelle. «On va d'abord répondre à notre actionnaire. Le travail d'analyse n'est pas encore terminé», a affirmé sa porte-parole, Marie-Élaine Deveault.

C'est initialement en 2008 que le gouvernement Charest devait décider s'il fermait la centrale ou procédait à sa réfection. Cette décision a été reportée à plusieurs reprises.

Hydro-Québec doit faire une mise à jour de la planification des travaux pour notamment tirer des leçons de la réfection d'une centrale jumelle, celle de Point-Lepreau au Nouveau-Brunswick. Cette réfection doit coûter 2,4 milliards de dollars, soit un milliard de plus que ce qui était prévu. La société d'État doit remettre ce document officiel cette année au ministre des Ressources naturelles, Clément Gignac.

Le ministre connaît-il la nouvelle estimation de plus de 3 milliardsde dollars? «Le dernier chiffre officiel qu'on a, c'est 1,9 milliard», a affirmé son attachée de presse, Jolyane Pronovost.

Le réacteur de Gentilly-2 aura atteint sa fin de vie à l'été 2013. Il doit être mis en arrêt d'ici le 31 décembre 2012. Avant de prendre une décision, M. Gignac attend aussi le rapport de la Commission canadienne de la sûreté nucléaire (CCSN), qui réévaluera les risques à la suite de la catastrophe de l'année dernière à Fukushima, au Japon.  

Mais les travaux de réfection sont commencés, a-t-on appris. Ce serait notamment le cas des unités de stockage. Certaines pièces ont déjà été commandées. Il faut parfois attendre plus d'une année pour les recevoir, et Hydro-Québec n'aurait pas voulu de retard coûteux dans le chantier. Par exemple, on aurait déjà reçu et entreposé un turbo-alternateur qui coûterait environ 175 millionsde dollars.

En juin dernier, la CCSN a donné le feu vert à la réfection, qui devrait selon elle commencer «aussi tôt que possible». L'année précédente, elle avait relevé 32 lacunes dans la centrale, dont quatre majeures, et n'en avait renouvelé le permis que pour des périodes de six mois.

Quand ces travaux ont débuté, l'estimation des coûts était inférieure à 2 milliardsde dollars. Elle aurait augmenté à plusieurs reprises, entre autres à cause des nouvelles exigences de la CCSN, par exemple au sujet du risque sismique. Gentilly-2 est construite sur la faille sismique laurentienne.  Ces nouvelles exigences augmenteraient les coûts de réfection et d'entretien annuel.

Selon nos informations, près de 150 personnes travaillaient sur la réfection, dont la moitié comme consultants. La majorité d'entre eux ont été remerciés depuis l'automne dernier. Par exemple, en janvier dernier, 30 membres de cette équipe, dont 26 consultants, ont été retirés du projet. «C'est un projet qui évolue en fonction du contexte, et la planification des travaux s'adapte au fur et à mesure», assurait alors une porte-parole de la société d'État au Nouvelliste de Trois-Rivières. Hydro-Québec assurait hier encore qu'aucune décision n'a encore été prise sur le sort de Gentilly-2.

Le gouvernement Charest répète qu'il a un «préjugé favorable» envers la réfection de la centrale, qui permettra de maintenir 800 emplois dans la région en Mauricie.

Jeudi dernier, le PQ a relevé que 275 millions de dollars étaient prévus dans le dernier budget en 2012-2013 pour «le projet de réfection» de Gentilly-2. Il y avait aussi 157 millions pour 2011-2012 et 22 millions pour 2013-2014. Le ministre Gignac a peiné à expliquer pourquoi ces chiffres apparaissaient dans le budget. Il s'agit «d'intentions d'investissements», a-t-il avancé, en insistant sur le fait que la décision n'a pas encore été prise.

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1,9 milliard Estimé des coûts en 2008

+ 3 milliards Estimé des coûts aujourd'hui

800 millions Somme déjà engagée par Hydro-Québec