Le ministre des Affaires étrangères, Lawrence Cannon, s'apprête à prendre le bâton de pèlerin pour défendre la souveraineté canadienne dans le Grand Nord.

Le chef de la diplomatie canadienne compte se rendre d'ici à quelques semaines dans les sept autres pays membres du Conseil de l'Arctique, notamment les États-Unis, la Russie, le Danemark, la Finlande, la Norvège et la Suède, pour réaffirmer la position canadienne dans cette région, a appris La Presse.

C'est la première fois que le Canada lance une telle offensive diplomatique auprès des pays membres du Conseil de l'Arctique afin de faire valoir sa souveraineté. Le respect de la souveraineté canadienne dans le Nord est d'ailleurs la priorité du ministre Cannon.

«Pour notre gouvernement, l'Arctique fait évidemment partie de nos priorités. J'ai l'intention d'aller répéter nos messages et nos ambitions à ce sujet. Je vais expliquer ce que le gouvernement a fait et ce qu'il a l'intention de faire très prochainement», a affirmé vendredi M. Cannon dans une entrevue.

Depuis son arrivée au pouvoir, le gouvernement Harper a fait de la protection de la souveraineté canadienne dans le Nord une véritable obsession. Le premier ministre Stephen Harper s'est rendu dans cette région au moins trois fois pour annoncer des investissements importants afin d'y augmenter la présence canadienne.

Le gouvernement Harper a notamment annoncé son intention d'acheter de nouveaux brise-glaces pour patrouiller cette région. Il compte aussi construire de nouveaux ports et établir de nouveaux centres de recherche.

En août dernier, le premier ministre a aussi annoncé qu'Ottawa investira 100 millions de dollars en cinq ans dans un vaste projet de géocartographie du Grand Nord canadien. Le but de ce projet est de réaliser, avec des instruments de la plus récente technologie, un portrait de la géographie du territoire, mais aussi du potentiel de ses ressources énergétiques et minérales.

Le gouvernement pourra aussi utiliser les résultats de ce projet, qui permettra de bien délimiter son plateau continental, afin de plaider sa cause devant les Nations unies pour que le Canada puisse étendre sa juridiction sur les eaux arctiques de 100 à 200 milles marins au large de ses côtes. Le Canada a jusqu'en 2013 pour préparer sa cause.

Selon un rapport rédigé par le United States Geological Survey, les fonds sous-marins de l'Arctique pourraient receler 13% des réserves de pétrole non découvertes de la planète et 30% des réserves de gaz naturel. Une bonne partie de ces réserves se trouveraient entre le Canada et le Groenland.

Avec le réchauffement de la planète, il devient plus facile pour les navires de traverser l'Arctique et l'exploration marine pourrait devenir une opération alléchante pour certains pays. D'où l'importance de faire respecter la souveraineté canadienne dans le Grand Nord.

Activité militaire russe

Depuis quelques mois, le Canada doit d'ailleurs composer avec une Russie qui a accru son activité militaire dans la région, très souvent à la limite des frontières internationales. En septembre dernier, par exemple, le conseil national russe de la sécurité s'est réuni dans une base située dans l'archipel François-Joseph. En outre, le président russe, Dmitri Medvedev, souhaite faire adopter des lois qui auraient pour effet de délimiter de manière unilatérale les frontières russes dans l'Arctique.

À l'été 2007, le Canada a mal réagi lorsque la Russie a déposé un drapeau dans une capsule en titane au fond de l'océan Arctique.

En outre, le gouvernement canadien tente de faire respecter par les États-Unis la frontière maritime entre le territoire actuel de l'Alaska et le Canada le long du 141e méridien. Cette frontière a été établie en 1825 par la Grande-Bretagne et la Russie, à qui appartenait l'Alaska à l'époque. Mais les États-Unis remettent cette frontière en question et tentent d'en établir une nouvelle qui serait à égale distance entre les deux pays.

Le Canada affirme que les eaux du passage du Nord-Ouest sont canadiennes et il réclame le droit d'y gérer la navigation et l'accès. Les États-Unis, pour leur part, répliquent qu'il s'agit d'un détroit international.

«Il est important que le gouvernement puisse assumer ses responsabilités, mais il doit le faire en occupant le territoire si l'on veut atteindre nos quatre grands objectifs: exercer notre souveraineté dans l'Arctique, protéger le patrimoine environnemental, promouvoir le développement économique et social et améliorer la gouvernance interne», a dit le ministre Cannon.

Cela dit, le chef de la diplomatie canadienne a tenu à souligner que le Canada est prêt à collaborer avec les pays pour assurer la sécurité et la protection de l'environnement dans l'Arctique ou porter secours à des bateaux en détresse.

«Il y a beaucoup de pays qui s'intéressent activement à bien gérer la suite des choses dans l'Arctique. Mais pas un pays ne conteste la souveraineté du Canada dans l'Arctique», a dit le ministre.