Journée mouvementée pour la protection de la vie privée et de la transparence à Ottawa. Renseignements personnels égarés, surveillance accrue de l'internet, demande de réforme de la Loi sur l'accès à l'information: le gouvernement et ses agences ont été rappelés à l'ordre de toutes parts.

 

La commissaire à la protection de la vie privée et la vérificatrice générale ont parti le bal hier matin en publiant deux rapports qui blâment Élections Canada, Passeport Canada et Revenu Canada pour des pratiques douteuses.

 

La commissaire Jennifer Stoddart a entre autres découvert qu'Élections Canada avait égaré plusieurs listes d'électeurs lors d'élections récentes, tant partielles que générales. Ces listes comprennent les noms, adresses et dates de naissance d'en moyenne 350 électeurs chacune. «Il s'agit d'une faille importante dans la sécurité du système électoral», a déclaré Mme Stoddart en point de presse.

«Dans un monde de crédit et de cartes d'identité, a-t-elle ajouté, les forces policières nous disent que la date de naissance est la clé de la reconstruction d'une nouvelle identité ou d'une identité frauduleuse.»

Elle a aussi rappelé qu'en 2006, des listes électorales avaient été retrouvées dans des locaux de sympathisants des Tigres de libération de l'Elam tamoul lors de perquisitions policières à Montréal et à Toronto. Les Tigres sont considérés être une organisation terroriste au Canada.

Les deux chiens de garde fédéraux ont également pointé Revenu Canada pour avoir systématiquement recueilli les numéros d'assurance sociale d'enfants au cours des dernières années. L'agence a le droit de le faire, a noté Mme Stoddart, mais elle n'a pas «envisagé les risques potentiels relatifs à la vie privée».

Surveillance accrue de l'internet?

Par ailleurs, la commissaire à la protection de la vie privée a réitéré ses appréhensions face à un projet caressé par le gouvernement de légiférer pour permettre à la police d'avoir accès aux échanges électroniques entre internautes.

En comité parlementaire, mercredi, le ministre de la Sécurité publique, Peter Van Loan, a indiqué que le gouvernement envisageait d'actualiser les lois, qui selon lui ont été conçues pour «l'ère du téléphone à cadran».

Cette surveillance nécessiterait l'autorisation de la Cour, mais risque tout de même d'alerter les groupes de défense des libertés individuelles. Ce n'est pas la première fois que le gouvernement canadien tente de légiférer ainsi. La dernière fois, c'était le gouvernement Martin, en 2005.

«C'est sujet à de très grandes inquiétudes par rapport à la vie personnelle de tout le monde parce qu'il s'agirait de quelque chose qui s'appliquerait à l'ensemble des citoyens», a dit Mme Stoddart, précisant que le système actuel ne s'applique qu'à ceux pour lesquels on a une raison légitime de soupçonner qu'il faudrait aller plus loin et fouiller leurs renseignements personnels.

Nouvelle loi sur l'accès à l'information

Enfin, le comité parlementaire de l'accès à l'information a adopté hier une motion pour réclamer que le gouvernement adopte d'ici le 31 mai 2009 une nouvelle Loi sur l'accès à l'information.

Déposée par la députée du Bloc québécois Carole Freeman, la motion indique que cette nouvelle loi «renforcée et modernisée [...] pourrait s'inspirer des travaux du commissaire à l'information».

En entrevue à La Presse, il y a près d'un mois, le commissaire Robert Marleau a déclaré que le système d'accès à l'information et la gestion de la documentation au gouvernement fédéral étaient en crise. Il a indiqué que les prochaines données qui seraient rendues publiques par son ministère pourraient bien confirmer une tendance à la baisse du rendement du gouvernement en matière d'accès à l'information, tendance observée depuis l'arrivée au pouvoir des conservateurs de Stephen Harper.