Le gouvernement Harper compte imposer des peines de prison plus sévères pour certains crimes commis par des membres de gangs de rue et de groupes criminels.

C'est ainsi qu'Ottawa entend répondre à ce phénomène en croissance au Québec comme ailleurs au Canada. Selon les statistiques du ministère de la Justice, 20% des homicides commis au pays sont maintenant liés à ces gangs.

 

Le projet de loi déposé hier au Parlement par Rob Nicholson, ministre fédéral de la Justice, prévoit ainsi que tout meurtre lié à un groupe criminel sera automatiquement jugé comme étant un meurtre avec préméditation. Le coupable ne serait ainsi admissible à une libération qu'après un minimum de 25 ans de prison.

La législation crée aussi trois nouvelles infractions. L'une d'elles vise les fusillades au volant, ou les fusillades avec insouciance, passibles d'une peine de prison d'au minimum quatre ans, et d'au maximum 14 ans.

Les deux autres, les voies de fait graves et les agressions armées contre un agent de la paix ou un fonctionnaire public, entraîneraient un maximum de 14 ans de détention.

«C'est un pas de plus dans notre ordre du jour qui vise à durcir le ton face à la criminalité, a déclaré le ministre de la Justice. Nous devons envoyer le message que ce genre d'activités ne sera pas toléré.»

«À Montréal, en particulier, les gangs de rue et le crime organisé nuisent à la qualité de vie et à l'économie de plusieurs quartiers, a renchéri le lieutenant québécois du gouvernement Harper, Christian Paradis. Nos rues ne sont ni des zones de guerre ni des places à fusillades.»

L'opposition en accord

Contrairement à ce qu'il avait annoncé, le gouvernement ne soumettra pas ce premier projet de loi en matière de justice criminelle à un vote de confiance.

Tous les partis de l'opposition se sont tout de même prononcés en faveur des amendements au Code criminel introduits à la Chambre des communes, hier. Le Bloc québécois, le NPD et le Parti libéral ont même réclamé que le gouvernement en fasse davantage pour lutter contre le crime organisé.

«Nous avons besoin d'une stratégie antigang complète qui fonctionne. Ce projet de loi, seul, apportera une petite amélioration, mais il ne va pas assez loin», a déclaré la députée néo-démocrate Dawn Black.

Cette stratégie devrait inclure plus de policiers dans les rues et des changements législatifs pour forcer les fournisseurs de l'internet à donner davantage d'informations sur ses utilisateurs, selon le NPD.

Le Bloc québécois, pour sa part, aurait souhaité que le gouvernement mette un terme à certaines libérations hâtives, en annulant entre autres la pratique du temps d'emprisonnement qui compte pour le double quand il est purgé avant le prononcé de la sentence.

Quant aux libéraux, ils auraient voulu que le ministre Nicholson se plie davantage aux demandes des provinces, dont celles de la Colombie-Britannique, qui réclame des pouvoirs d'enquête accrus.

Trop de répression

L'approche coercitive mise de l'avant par Ottawa hier a néanmoins été critiquée par certains experts.

«Ce que le gouvernement Harper fait, c'est qu'il ne parle que de la répression. Si vous ne faites que cela, vous n'avez pas de sécurité», a dénoncé Irvin Waller, professeur de criminologie à l'Université d'Ottawa et auteur du livre Less Law, More Order (moins de lois, plus de sécurité).

«C'est le genre de loi qu'un groupe d'avocats dans leur tour d'ivoire met de l'avant. Ce n'est pas ce que devrait proposer un gouvernement qui veut s'attaquer à la violence et aux crimes commis avec des armes à feu», a-t-il ajouté.

Selon lui, la réhabilitation et la prévention manquent cruellement à l'approche d'Ottawa. Les partis de l'opposition ont aussi soulevé cette préoccupation, mais dans une moindre mesure.