Environnement Canada est incapable de démontrer si les mesures comprises dans son plan de lutte contre les changements climatiques sont efficaces, conclut le commissaire à l'environnement, Scott Vaughan, dans un rapport rendu public hier.

«Sans un système pour faire le compte des réductions d'émissions résultant des mesures qu'il aura adoptées, le gouvernement ne pourra informer le Parlement sur leur efficacité», a souligné M. Vaughan en conférence de presse.

Environnement Canada a admis qu'il lui semblait impossible d'avoir «un système permettant de surveiller les réductions réelles d'émissions de GES pour chacune des mesures déclarées dans les plans».

Dans son rapport, le commissaire note une contradiction entre les estimations de réductions d'émissions et l'absence de mesures des progrès réalisés. «Le Ministère n'a pas expliqué pourquoi les réductions attendues d'émissions peuvent être estimées à l'avance, alors que les réductions réelles ne peuvent être mesurées après le fait», écrit M. Vaughan.

Bien que le gouvernement conservateur ait déjà indiqué qu'il ne respecterait pas les objectifs du protocole de Kyoto, il est toutefois tenu, théoriquement, de suivre les exigences de la Loi de mise en oeuvre du document, entrée en vigueur en 2007, grâce à un effort concerté des partis de l'opposition. Conformément à cette loi, le gouvernement a déjà présenté deux plans de lutte contre les changements climatiques, en 2007 et 2008.

Ottawa est notamment tenu, par la Loi, d'inclure dans ces plans la description et les mécanismes des mesures prises pour réduire les émissions, la date d'entrée en vigueur des mesures, ainsi que la quantité de réductions d'émissions de gaz à effet de serre réalisées ou anticipées. Or, le gouvernement a omis de remplir plusieurs de ses exigences, estime le commissaire.

M. Vaughan constate par ailleurs une «faiblesse récurrente» et un «manque de transparence» dans le calcul des prévisions de réductions dans les plans gouvernementaux. Les réductions d'émissions attendues dans l'élaboration du Cadre réglementaire sur les émissions industrielles de gaz à effet de serre sont «surestimées», selon le commissaire. Or, cette mesure représente 80% de la réduction totale attendue pour la période allant de 2008 à 2012.

Le gouvernement mise sur le Fonds technologique pour développer de nouveaux procédés verts et ainsi contribuer à la réduction des émissions. Or, M. Vaughan constate que cette mesure ne donnera pas de résultats avant longtemps, «compte tenu du temps nécessaire pour développer, déployer et adopter de nouvelles technologies».

Les objectifs du gouvernement pour 2012, déjà très loin de ceux du protocole de Kyoto, ne seront très probablement pas atteints, conclut donc le rapport.

«Vaste fumisterie»

Réagissant à la publication du rapport, le chef du Bloc québécois, Gilles Duceppe, a qualifié de «vaste fumisterie» les actions du gouvernement conservateur, estimant qu'il ne fait que «gagner du temps» au profit des pétrolières. Son porte-parole en environnement, Bernard Bigras, a pour sa part qualifié de «hors-la-loi» le gouvernement en matière de lutte contre les changements climatiques.

La Loi de mise en oeuvre du protocole de Kyoto prévoit que le commissaire à l'environnement évalue tous les deux ans les progrès réalisés par le Canada pour mettre en oeuvre ses plans de lutte contre les changements climatiques. Le Ministère doit présenter son prochain plan d'ici la fin du mois de mai.

Le ministre de l'Environnement a rejeté les critiques du commissaire et assuré que le Canada se présenterait à la réunion internationale de Copenhague, à la fin de l'année, comme un «joueur majeur».

«Nous avons une stratégie et nous faisons des progrès. Nous travaillons sur les plans domestique, continental et international, a dit le ministre Jim Prentice. J'ai déjà indiqué que d'ici à Copenhague, nous aurons une politique pour chaque source d'émission au Canada.»