Denis Coderre n'a pas seulement démissionné de son poste de lieutenant politique de Michael Ignatieff, hier matin. Il a carrément tiré à bout portant sur les conseillers torontois du chef libéral.

Selon le coloré député de Bourassa, c'est la garde rapprochée de Michael Ignatieff à Toronto qui a convaincu le chef de désavouer son lieutenant québécois au sujet de la candidature de Martin Cauchon dans Outremont.

 

«Le message qui est envoyé par ces récents événements est le suivant: si vous voulez avoir gain de cause au Québec, vous n'avez qu'à court-circuiter les autorités québécoises du parti en vous adressant plutôt à la garde rapprochée du chef à Toronto», a-t-il balancé.

«Au-delà de ces événements, des questions beaucoup plus fondamentales se posent: à qui doit s'en remettre le chef du Parti libéral du Canada pour décider des enjeux qui concernent strictement le Québec? Doit-il s'en remettre à son lieutenant québécois ou plutôt à ses conseillers torontois, qui ont une méconnaissance totale de la réalité sociale et politique québécoise?»

Invité à dire s'il visait Bob Rae (que Martin Cauchon avait appuyé lors de la course à la direction de 2006), M. Coderre a refusé de nommer qui que ce soit. Par contre, il a dit bien connaître les «sources anonymes» qui s'en sont prises à son autorité dans les médias au cours des dernières semaines. Il a rétorqué que toutes ces décisions avaient été prises après consultation d'un comité d'une vingtaine de personnes.

D'Outremont à Jeanne-Le Ber à Outremont

M. Coderre ne souhaitait pas que M. Cauchon se représente dans Outremont et misait sur la venue d'une candidate-vedette, Nathalie Le Prohon. Dans un premier temps, M. Ignatieff avait appuyé la décision de son lieutenant. Mais il a fait un virage à 180 degrés devant la grogne palpable au sein du Parti libéral du Canada.

Élu à trois reprises dans Outremont, M. Cauchon avait volontairement quitté la politique avant les élections générales de 2004. Il avait alors repris la pratique du droit à Montréal. Au cours des derniers mois, il avait exprimé son désir de retourner à la vie publique. Dans une tentative de compromis, le parti lui avait proposé de se présenter dans Jeanne-Le Ber, circonscription du sud-ouest de Montréal jugée prenable.

Mais M. Cauchon a refusé. Pour lui, c'était Outremont ou rien. M. Ignatieff a finalement cédé aux pressions. Quant à Mme Le Prohon, elle se présentera dans Jeanne-Le Ber.

Lieutenant controversé

Député de Bourassa depuis 1997, M. Coderre a occupé plusieurs postes de ministre sous Jean Chrétien avant d'être écarté du cabinet par Paul Martin. Il a repris du service avec l'arrivée de Michael Ignatieff à la tête du PLC, en janvier 2009. Le nouveau leader l'a tout de suite nommé lieutenant au Québec avec le mandat de préparer l'aile québécoise en vue des prochaines élections fédérales.

Depuis, son travail n'a jamais fait l'unanimité. D'aucuns, sous le couvert de l'anonymat, lui ont reproché ses jeux en sous-main.

Hier matin, Denis Coderre a aussi démissionné de son poste de critique libéral en matière de défense. Il compte cependant demeurer député de Bourassa. Il s'est dit fier du travail accompli dans l'organisation électorale, indiquant que 68 candidats avaient été confirmés ou étaient sur le point de l'être dans les 75 circonscriptions de la province.