Grâce à l'appui de députés du Parti libéral et du NPD, le projet de loi C-391, qui vise à abolir l'obligation d'enregistrer les armes longues au Registre canadien des armes à feu, a passé l'étape importante de la deuxième lecture à la Chambre des communes, mercredi. Il sera étudié au Comité permanent de la sécurité publique et nationale.

Présenté par une députée conservatrice, Candice Hoeppner, le projet C-391 est la dernière tentative des conservateurs de Stephen Harper de démanteler la majeure partie d'un système adopté par les libéraux dans la foulée de la tuerie de Polytechnique et qu'ils ont toujours dénoncé comme trop coûteux, inefficace et nuisible pour les populations rurales. Au Québec, 95% des armes à feu enregistrées sont des armes longues, comme des fusils de chasse.Jusqu'à maintenant, le Parti libéral s'était toujours catégoriquement opposé aux assauts répétés du gouvernement en ce sens. En avril dernier, le chef Michael Ignatieff avait même forcé ses députés à voter pour une motion du Bloc québécois qui plaidait en faveur du maintien du registre.

Mais en point de presse quelques heures avant le vote, M. Ignatieff a expliqué sa décision de laisser ses troupes voter cette fois-ci librement par le mécontentement que le registre soulève dans les campagnes canadiennes, où chasseurs et agriculteurs se plaignent depuis longtemps de ce qu'ils considèrent comme un fardeau administratif trop envahissant.

«Il faut avouer que nous avons des problèmes dans les zones rurales, dans les régions du Canada, et il faut améliorer le système pour qu'il ait une légitimité partout au pays», a déclaré M. Ignatieff, qui a quand même pris soin de réitérer le soutien de son parti à l'existence d'un registre couvrant toutes les armes à feu.

Tant M. Ignatieff que le chef du NPD, Jack Layton, ont dénoncé ce qu'ils ont décrit comme une tactique de Stephen Harper de tenter de diviser le Canada en deux factions: les gens de la ville et ceux de la campagne. Les conservateurs ont mené, au cours des derniers jours, une offensive publicitaire pour enjoindre aux électeurs de circonscriptions rurales représentées par les autres partis de joindre leur député pour lui dire de voter pour le projet C-391.

Apparemment, la manoeuvre a porté ses fruits. Les conservateurs n'avaient besoin que d'une dizaine de votes supplémentaires afin d'obtenir les 155 voix nécessaires pour faire passer à ce projet de loi d'initiative privée le cap de la deuxième lecture. Finalement, le résultat a été de 164 «pour» et 137 «contre». Tous les députés du Bloc québécois ont voté contre. Sans surprise, ceux du NPD et du PLC qui lui ont donné leur appui viennent principalement de circonscriptions rurales. C'est donc dire que les nombreuses interventions des derniers jours pour empêcher ce scénario de se réaliser ont fait choux blancs, y compris celle de tous les députés provinciaux du Québec, qui ont adopté mercredi à l'Assemblée nationale une motion à l'unanimité enjoignant aux politiciens d'Ottawa de ne pas voter pour le projet. Mais tout n'est pas perdu pour ces opposants, puisque le projet C-391 devra encore passer plusieurs étapes avant de devenir loi: une étude en comité, un vote en troisième lecture à la Chambre des communes, puis un processus similaire au Sénat.