Le Bloc québécois a «tiré des leçons» de la défaite crève-coeur à l'élection partielle dans Rivière-du-Loup. Dorénavant, les députés devront s'engager à rester pour la durée de leur mandat, sauf en cas de force majeure, a souligné le chef bloquiste, Gilles Duceppe, en entrevue à La Presse.

«Les électeurs n'aiment pas que des députés partent après quelques mois de mandat. Ça nous a touchés fortement là-bas», a estimé M. Duceppe au moment de faire le bilan sur la session parlementaire qui s'est terminée à Ottawa la semaine dernière.

 

Bastion bloquiste depuis 1993, la circonscription de Rivière-du-Loup est passée aux mains des conservateurs à l'issue d'un scrutin le 9 novembre. Le populaire député Paul Crête avait laissé son siège au printemps afin de se présenter à une élection partielle où il avait finalement mordu la poussière.

«C'était aussi le cas dans Hochelaga, a analysé M. Duceppe. Réal Ménard a par contre réussi son saut en politique municipale. Mais la base était plus forte à Montréal.»

«Aux dernières élections générales, on n'était pas forts dans Montmagny et ça s'est reproduit, a ajouté le chef bloquiste. Mais notre base plus solide nous a boudés dans Rivière-du-Loup et dans La Pocatière.»

Cette élection partielle ne représente cependant pas l'état de la situation dans l'ensemble du Québec, où l'écart entre les conservateurs et les bloquistes s'est agrandi cet automne, au profit de ces derniers, estime M. Duceppe. Un sondage Harris-Décima plaçait récemment le Bloc québécois à 17 points devant son plus proche adversaire au Québec, le Parti libéral.

De plus, les deux dossiers chauds de l'automne, les changements climatiques et le sort des prisonniers afghans, nuisent considérablement au gouvernement de Stephen Harper, croit le chef bloquiste.

«Ça se reflète déjà dans les sondages. Selon Ekos (la semaine dernière), les conservateurs stagnent, et au Québec ils sont rendus à 16%», a-t-il souligné.

À l'approche des Fêtes, le gouvernement conservateur se retrouve selon lui dans une bien mauvaise position sur la question des allégations de torture dont auraient été victimes les détenus transférés par le Canada aux autorités afghanes - la controverse fait rage sur la colline parlementaire à Ottawa depuis maintenant un mois.

«Ça se sent quand des gens nous mentent. Et ça va rester, encore plus que le problème même de la torture. On nous ment effrontément», croit M. Duceppe, qui reproche au ministre de la Défense nationale, Peter MacKay, d'avoir changé sa version des faits à de nombreuses reprises.

Sur la question des changements climatiques, le refus des conservateurs d'adopter des cibles de réduction des gaz à effet de serre se fait ressentir dans les sondages au Québec, où la population, en grande majorité, désapprouve cette position, estime le chef bloquiste.

Mais la session parlementaire d'automne a aussi révélé «la faiblesse épouvantable des libéraux», selon Gilles Duceppe.

«Ils n'ont rien proposé, ils ont divisé. C'est un manque d'organisation qui témoigne d'un manque de leadership», a affirmé le chef bloquiste.

La menace de faire tomber le gouvernement pour ensuite se rétracter a considérablement nui aux troupes de Michael Ignatieff, selon lui. «Ils ne sont pas crédibles. Je l'avais dit dès janvier quand M. Ignatieff a mis fin à la coalition et a dit qu'il mettait le gouvernement en observation. Il a prouvé que celui qui est en observation, ce n'est pas le gouvernement, mais lui-même», a conclu M. Duceppe.