Le premier ministre Stephen Harper déplore les virulentes attaques lancées contre son gouvernement par Jean Charest à l'occasion de la conférence des Nations unies sur les changements climatiques à Copenhague.

Selon M. Harper, les Canadiens s'attendent à ce que leurs élus travaillent main dans la main pour défendre les intérêts du pays à l'étranger au lieu de se lancer des flèches devant la presse internationale.

 

Dans une entrevue de fin d'année accordée à des réseaux de télévision, M. Harper a dit espérer que les propos «malheureux» de Jean Charest n'aient pas d'incidence sur l'unité nationale.

«Les Canadiens s'attendent à ce que, lorsque le Canada participe à des négociations internationales, les perspectives partisanes provinciales n'aient pas leur place à l'étranger. Mais en bout de piste, le Canada a conclu un accord avec les autres pays du monde qui est important. Et maintenant on a besoin de la collaboration de tout le monde pour mettre cette entente en application», a dit M. Harper au réseau TVA.

Durant la conférence de Copenhague, M. Charest a critiqué à plusieurs reprises les cibles du gouvernement Harper en matière de réduction des émissions de gaz à effet de serre, les jugeant nettement insuffisantes.

Le gouvernement Harper propose de réduire les émissions de GES de 20% d'ici à 2020, mais en ayant 2006 comme année de référence et non pas 1990, comme le veut le protocole de Kyoto, ratifié par le Canada en 2003. Par rapport à 1990, le plan du gouvernement Harper verrait une diminution des émissions de GES de 3% seulement.

Le Québec a des cibles plus ambitieuses: 20% d'ici à 2020, mais en gardant 1990 comme année de référence. «Le gouvernement fédéral se trouve dans une position où, même à l'intérieur du Canada, il est minoritaire dans sa perspective», a notamment affirmé M. Charest la semaine dernière à Copenhague.

M. Charest a laissé entendre que le gouvernement Harper maintient des cibles peu contraignantes afin de permettre à l'Alberta de continuer d'exploiter les sables bitumineux, une industrie très polluante, alors que d'autres provinces font des efforts importants pour réduire leurs émissions.

Il a aussi soutenu que le Canada devait «aller plus loin» et «cesser de suivre la politique des Américains» et affirmé que le Canada ne pourrait mettre en oeuvre une entente conclue à Copenhague sans le soutien des provinces.

Les Albertains outrés

Ces propos ont soulevé l'ire du ministre fédéral de l'Environnement Jim Prentice. Et ils semblent avoir aussi donné de l'oxygène au mouvement souverainiste en Alberta, selon le premier ministre de cette riche province, Ed Stelmach.

M. Stelmach a révélé la semaine dernière que les critiques formulées contre sa province par Jean Charest et Dalton McGuinty, le premier ministre de l'Ontario, ont conduit certains de ses concitoyens à se demander si l'heure n'était pas venue pour l'Alberta, qui remplit les coffres d'Ottawa grâce à l'industrie pétrolière, d'envisager la séparation du reste du pays.

«Il y a une certaine insatisfaction en Alberta au sujet du manque de reconnaissance du rôle que joue la province au pays. Plusieurs croient que notre contribution financière n'est pas reconnue», a dit M. Stelmach vendredi. Il a fait ce commentaire après avoir répondu à des questions de ses électeurs sur le site internet du gouvernement. L'un d'entre eux a carrément demandé à M. Stelmach: «Pouvons-nous nous séparer du Canada?» Le premier ministre a souri après avoir lu cette question et a affirmé que le Canada avait été un bon pays pour sa famille et lui.

En entrevue à TVA, M. Harper a soutenu que le Canada compte aligner sa politique de lutte contre le réchauffement de la planète sur celle des États-Unis. L'administration de Barack Obama prévoit d'ailleurs des cibles comparables à celles du Canada, soit une réduction de 17% d'ici à 2020 mais avec 2005 comme année de référence. Les États-Unis n'ont jamais ratifié le protocole de Kyoto.

«Je sais qu'il y a des gens qui disent qu'on peut régler ce problème en réglementant l'industrie des sables bitumineux. Mais les sables bitumineux ne représentent que 4% des émissions de gaz à effet de serre au Canada et nous avons l'intention de réduire nos émissions de 20%. Pour vraiment atteindre nos objectifs, nous avons besoin de la participation de toutes les provinces et de toutes les industries», a dit M. Harper.

À lui seul, le secteur des transports est responsable de 25% des émissions de GES au pays.