Après avoir promis de ne pas augmenter les taxes, le gouvernement fédéral veut imposer des frais supplémentaires aux passagers du transport aérien pour payer les coûts des nouveaux contrôles de sécurité.

À partir du 1er avril, un billet aller-retour coûterait entre 5 et 18$ de plus, selon qu'il s'agit d'un vol intérieur ou international.«C'est notre responsabilité comme gouvernement de prendre toutes les mesures raisonnables pour assurer la sécurité du public, a souligné le ministre des Transports, John Baird, qui a choisi de faire son annonce à l'aéroport d'Ottawa. Les nouveaux frais ne sont jamais bienvenus mais, selon moi, c'est absolument essentiel si on veut maintenir la sécurité dans notre système aérien.»

Les nouveaux équipements technologiques, comme les scanners corporels, et l'ajout de personnel pour accroître la sécurité ont un coût, a ajouté le ministre, qui privilégie le principe de l'utilisateur-payeur.

«Notre gouvernement croit que les coûts devraient être imputés à ceux qui utilisent le service plutôt qu'à l'ensemble des contribuables canadiens», a dit M. Baird, qui rejette catégoriquement l'appellation de «taxe» pour ces nouveaux frais.

Avec ces revenus supplémentaires, Ottawa promet d'investir 1,5 milliard de dollars en cinq ans dans l'Administration canadienne de la sûreté du transport aérien, dont la structure, les dépenses et l'efficacité seront passées en revue.

Le «droit pour la sécurité des passagers du transport aérien», dont les taux seraient majorés, a été établi en 2002 pour financer les coûts liés aux nouvelles mesures de contrôles instaurées après les attentats du 11 septembre 2001.

C'est maintenant pour répondre à de nouvelles exigences des Américains, après l'attentat raté du 25 décembre 2009, que le Canada doit imposer des mesures de sécurité supplémentaires.

La mesure proposée devra toutefois être approuvée par le Parlement, qui reprend ses travaux la semaine prochaine.

Déjà, les partis de l'opposition à Ottawa et les transporteurs aériens ont vivement dénoncé cette «nouvelle taxe».

«Il peut appeler ça comme il veut, mais c'est une taxe, a lancé le critique du Parti libéral en matière de transports, Joe Volpe. Le ministre annonce cela en dehors des paramètres du processus budgétaire et, contrairement à ce qu'il prétend, les conservateurs brisent leur promesse de ne pas augmenter les taxes.»

Pour le chef adjoint du NPD et député d'Outremont, Thomas Mulcair, le public ne se laissera pas «duper» pour «la nouvelle taxe Baird».

«Les passagers paient déjà pour la sécurité. Ils vont juste payer plus parce que le gouvernement a décidé de les taxer davantage», a estimé M. Mulcair.

À l'Association du transport aérien du Canada (ATAC), qui regroupe 80 transporteurs, on déplore «le manque de transparence» du gouvernement fédéral. «On paie, on paie, on paie, mais on ne sait pas où est dépensé l'argent», critique le président de l'Association, John McKenna, qui fait remarquer que, avant cette augmentation, le Canada avait déjà les tarifs à la sécurité les plus élevés au monde après les Pays-Bas.

«Ce qu'on a de la difficulté à avaler, c'est que nous sommes le seul mode de transport où on paie pour sa sûreté, explique M. McKenna. Pourquoi c'est seulement les voyageurs qui paient pour la sécurité nationale?»

Pour une industrie qui a été passablement touchée par la crise économique, cette nouvelle augmentation, qui s'ajoute aux autres frais, pèsera lourd dans la balance.

«Ça nous rend moins concurrentiels par rapport à d'autres mode de transport», soutient le président de l'ATAC.

Le ministre Baird a lui-même reconnu que l'industrie avait souffert de la récession, mais ce n'est pas quelques dollars de plus, selon lui, qui vont empêcher les gens de voyager.

«Nous n'aurions même pas considéré adopter cette mesure l'année dernière. Nous voulions d'abord nous assurer que l'économie soit sur le chemin de la reprise, a dit le ministre. Il y a maintenant des indications que c'est le cas, et Air Canada, WestJet et Porter, par exemple, sont tous en bien meilleure posture qu'il y a un an.»

Mais pour l'ATAC, il est encore trop tôt. «En aviation, on ne voit pas de signe de reprise encore», conclut M. McKenna.