Le gouvernement Harper annonce une nouvelle ère d'austérité à Ottawa, qui commencera par le gel des salaires du premier ministre, de ses ministres, des députés et des sénateurs de même que des budgets des ministères.

Dans le discours du Trône lu au Sénat mercredi pour marquer le début de la nouvelle session parlementaire, Ottawa a dit vouloir s'attaquer au déficit en limitant notamment «l'ensemble des dépenses au titre de programmes fédéraux». Outre les salaires des politiciens, on compte aussi geler le budget de fonctionnement des ministères, «ce qui englobe les salaires, les frais administratifs et les coûts indirects». On promet également d'éliminer toute nomination «superflue» dans les organismes fédéraux.

Ces mesures s'inscrivent dans l'objectif du gouvernement de continuer la lutte contre l'incertitude économique tout en rétablissant l'équilibre budgétaire, compromis par un déficit de 56 milliards de dollars en 2009-2010.

«Les Canadiens vivent selon leurs moyens et s'attendent à ce que leurs gouvernements en fassent autant», a dit la gouverneure générale.

Pour ce faire, le gouvernement a dressé un plan en deux étapes : réduction graduelle des dépenses de stimulation économique d'ici à la fin de l'année financière 2011 et limitation des dépenses de programmes fédéraux.

Le discours précise que le redressement des finances publiques «ne se fera pas aux dépens des retraités» ni au moyen de «réduction dans les paiements de transfert au chapitre de soins de santé et de l'éducation».

Mais nulle part dans ce discours d'une heure Michaëlle Jean n'a parlé de la péréquation, une omission qui a amené la vice-première ministre du Québec, Nathalie Normandeau, à exprimer la crainte de son gouvernement de voir Ottawa s'attaquer à ce programme.

Promesses et engagements

Intitulé Un Canada plus fort, une économie plus forte, le document porte les couleurs bleu, vert, jaune et blanc des Jeux olympiques de Vancouver, dont il ne manque d'ailleurs pas de rappeler le succès.

Dans ce texte de 25 pages où il annonce ses priorités pour les mois à venir, le gouvernement y est allé d'une série d'autres promesses et engagements. Sur le budget d'aujourd'hui, notamment, il a annoncé : «Notre gouvernement présentera un budget misant sur la création d'emplois et la croissance - maintenant et pour l'avenir.»

Le fédéral a exprimé clairement son intention d'ouvrir les secteurs des télécommunications et des satellites aux investissements étrangers et au capital de risque.

Au sujet de la Déclaration des Nations unies sur les droits des peuples autochtones, qu'Ottawa refuse de signer depuis plusieurs années, il a annoncé ce qui pourrait être un changement de cap : «Notre gouvernement prendra des mesures en vue d'appuyer ce document aspiratoire, dans le respect intégral de la Constitution et des lois du Canada.»

Dans le secteur du pétrole et de l'énergie, le discours du Trône a révélé qu'Ottawa entreprendra une révision des règlements «qui compliquent inutilement les processus d'approbation de projets». Le ministre des Ressources naturelles, Christian Paradis, a admis que les évaluations environnementales pourraient «en faire partie».

En matière d'environnement, le gouvernement a réitéré son soutien à l'entente de Copenhague et au dialogue sur l'énergie propre entre le Canada et les États-Unis. Il a aussi réaffirmé son intention de prendre le train du nucléaire, «en commençant par la restructuration d'Énergie atomique du Canada».

«Pas de vision»

Par ailleurs, le gouvernement Harper a profité du discours pour rappeler ses positions dans une série d'autres domaines. C'est le cas du registre des armes à feu, où il a déclaré qu'il «continuera à prôner l'adoption d'une loi du registre des armes d'épaule» malgré l'opposition, notamment de Québec.

C'est aussi le cas des réformes du Sénat et de la Chambre des communes, dans laquelle il a rappelé vouloir donner plus de poids à la Colombie-Britannique, à l'Ontario et à l'Alberta - une mesure aussi très impopulaire au Québec.

Au sujet de l'Afghanistan, Ottawa a réitéré sa volonté de retirer ses 2800 soldats d'ici à 2011.

«Ils ont fermé le Parlement pour ça? C'est ça, les résultats de la prorogation ? Il n'y a aucune vision pour l'avenir du pays là-dedans», s'est exclamé le chef libéral, Michael Ignatieff, après la lecture du discours. Les chefs des deux autres partis de l'opposition étaient aussi de cet avis.