Le gouvernement Harper n'a pas démontré jusqu'ici qu'il est capable de gérer les finances de l'État d'une manière compétente pour venir à bout en cinq ans du déficit record de 54 milliards de dollars, estime le chef du Parti libéral, Michael Ignatieff.

Dans une réplique plus étoffée au budget présenté jeudi par le ministre des Finances, Jim Flaherty, M. Ignatieff a soutenu hier que le gouvernement Harper s'est déjà trompé plusieurs fois dans ses projections sur le déficit en 2008 et en 2009.Il a rappelé que lorsque les conservateurs ont pris le pouvoir, en 2006, ils disposaient d'un surplus de 13 milliards de dollars. En outre, ils avaient affirmé, en 2008, que le Canada pourrait traverser la récession sans tomber dans l'ornière des déficits.

Or, dans le budget du mois de janvier 2009, le ministre Flaherty a dû admettre qu'Ottawa enregistrerait un déficit de 32 milliards. Trois mois plus tard, ce déficit a été de nouveau revu à la hausse, à 50 milliards, avant de s'établir à 54 milliards de dollars pour l'exercice financier 2009-2010.

«On ne peut pas diriger un pays si on ne sait pas compter, a laissé tomber M. Ignatieff. Mais ce ne sont pas seulement les chiffres qui posent problème. C'est surtout l'inexistence d'un plan cohérent pour reprendre en main les finances publiques.»

Dans le budget qu'il a présenté jeudi, le ministre Flaherty affirme être en mesure d'éliminer le déficit de 54 milliards en cinq ans sans augmenter les taxes et les impôts et sans réduire les transferts aux provinces. Il compte pour cela sur la fin du plan de relance économique de 19 milliards en 2010-2011, sur des compressions de 17,6 milliards de dollars en cinq ans et sur de nouveaux revenus générés par la reprise économique.

Lorsque le déficit sera éliminé, en 2015, la dette du pays aura augmenté de 159 milliards de dollars, passant de 463 milliards à 622 milliards.

«Le gouvernement affirme qu'il va geler les dépenses des ministères à partir de 2011 et c'est tout. Il ne dit pas quels programmes seront abolis, quels services les Canadiens vont perdre et où les conservateurs croient pouvoir trouver les économies nécessaires. Ce n'est pas un plan. C'est une promesse vide», a dit M. Ignatieff.

Le chef libéral a aussi critiqué la hausse prévue des cotisations de l'assurance emploi à partir du 1er janvier 2011. Selon lui, cette hausse arrivera à un bien mauvais moment pour les employés et les employeurs et pourrait empêcher la création de quelque 200 000 emplois.

Le critique libéral en matière de finances, John McCallum, a aussi tapé sur ce clou durant la période des questions, hier, aux Communes. Il a affirmé que le gouvernement Harper devrait maintenir le gel des cotisations à 1,73 cent par tranche de 100$ de gains assurables imposé à l'Office de financement de l'assurance emploi depuis deux ans. C'est cet organisme qui fixe le taux des cotisations pour assurer l'équilibre entre les revenus du régime et les prestations versées aux chômeurs.

Le ministre Flaherty a pour sa part entrepris une tournée hier pour mieux expliquer son budget. Dans un discours prononcé à London, dans le sud de l'Ontario, il a défendu son plan budgétaire et maintenu que le déficit sera éliminé dans cinq ans.

«Il est facile d'oublier dans quelle situation nous étions il n'y a pas si longtemps. Nous avons dû enregistrer des déficits afin de venir en aide aux Canadiens durant une récession qui a commencé à l'extérieur de nos frontières. C'est ce que nous sommes en train de faire. Nous allons finir le travail et, ensuite, nous allons revenir à des budgets équilibrés. C'est ce que les conservateurs savent faire», a dit M. Flaherty.

S'ils se montrent critiques envers le plan du gouvernement Harper pour éliminer le déficit, les libéraux refusent de dire ce qu'ils feraient s'ils étaient au pouvoir.

À l'instar des conservateurs, les libéraux promettent de ne pas hausser les impôts et de ne pas toucher aux transferts aux provinces. Le critique libéral John McCallum s'est contenté de dire que les libéraux présenteront un plan «crédible et prudent» avant les prochaines élections.

En outre, les libéraux n'ont pas l'intention de provoquer des élections générales. Les députés libéraux voteront donc contre le budget, mais pas en nombre suffisant pour mettre fin au règne des conservateurs.