Le gouvernement Harper s'oppose farouchement à l'idée d'imposer une taxe mondiale aux institutions financières. Il estime que cela entraînerait inévitablement une hausse des frais de service pour les consommateurs et punirait injustement les banques canadiennes, qui ont bien géré leurs actifs.

Cinq ministres influents ont lancé hier dans quatre villes du monde une offensive contre l'idée d'imposer une taxe aux banques, une option qui sera vraisemblablement discutée au sommet des pays du G20 à Toronto à la fin juin.

Les États-Unis, la Grande-Bretagne, la France, l'Union européenne et le Fonds monétaire international proposent l'adoption d'une telle taxe afin de constituer un fonds destiné à soutenir les banques qui pourraient se retrouver en difficulté. Mais le Canada, le Brésil et l'Australie s'y opposent.

Hier, à Ottawa, le ministre des Affaires étrangères du Canada, Lawrence Cannon, et le ministre de l'Industrie, Tony Clement, ont affirmé que cette mesure ferait mal non seulement aux banques canadiennes, mais aussi aux consommateurs. «La raison la plus importante pour laquelle nous nous opposons à une taxe bancaire est qu'elle serait injuste pour les consommateurs canadiens, qui subiraient inévitablement une augmentation du coût des services bancaires. Le gouvernement s'engage à protéger les Canadiens contre une taxation injuste», a affirmé le ministre Cannon.

Le ministre des Finances, Jim Flaherty, a prononcé un discours en ce sens à Bombay, en Inde, tandis que le président du Conseil du Trésor, Stockwell Day, et le ministre du Commerce international, Peter Van Loan, en ont fait autant à Shanghai et à Washington, respectivement.

«Il est impératif que le Canada continue résolument de s'opposer à une taxe bancaire internationale et de mettre en oeuvre un cadre réglementaire fort. Nous devons garantir la transparence de notre secteur bancaire tout en évitant de le surcharger avec une taxe qui le priverait de son avantage concurrentiel vis-à-vis des banques d'autres pays», a affirmé le ministre Tony Clement.

Il a ajouté que les banques canadiennes avaient géré leurs affaires avec prudence en évitant de s'exposer à des «actifs toxiques» et que le secteur bancaire du Canada «est le plus solide du monde» selon les évaluations du Forum économique mondial et de la société Moody's.

À Bombay, le ministre Jim Flaherty souhaité que l'on adopte une réglementation plus stricte des marchés financiers, afin notamment que les banques se dotent de réserves adéquates pour surmonter d'éventuels problèmes financiers. Cette idée est encore embryonnaire, mais elle devrait être suffisamment détaillée pour qu'on la soumette aux leaders du G20 comme solution de rechange à la taxe sur les banques.

Manoeuvre de diversion

Le Parti libéral s'est montré peu impressionné par cette campagne des ministres conservateurs. Le critique libéral en matière de finances, John McCallum, a affirmé qu'il s'agit d'une manoeuvre de diversion destinée à faire oublier l'isolement du Canada dans des dossiers comme les changements climatiques ou l'initiative pour la santé maternelle et infantile.

Il a souligné que c'est grâce aux règles «rigoureuses» maintenues par les libéraux dans les années 90, malgré les positions contraires des conservateurs, si les banques canadiennes sont restées à l'abri de la tempête économique qui a frappé la planète.

«L'élan en faveur d'une taxe mondiale sur les banques ralentit déjà. L'effort que déploient actuellement les conservateurs n'est qu'une autre manoeuvre de diversion. Les conservateurs se félicitent d'avoir réglé une question qui a déjà été réglée», a dit M. McCallum.