Même si le Canada et le Mexique s'entendent pour dire que l'imposition de visas aux citoyens mexicains pose problème, une solution permanente devra se faire attendre au moins un an.

Le ministre canadien de l'Immigration, Jason Kenney, a expliqué à sa sortie des Communes, jeudi, que son gouvernement espérait que sa nouvelle loi sur les réfugiés franchisse une première étape en Chambre avant les vacances estivales.

Mais le projet de loi devra par la suite être étudié par le Parlement, ce qui prendra vraisemblablement au moins un an avant que le statut du Mexique au sein de la loi canadienne ne puisse être modifié.

«Aucun gouvernement responsable ne peut éliminer le visa pour le Mexique avant une réforme du système d'asile», a fait valoir le ministre, après que le président du Mexique, Felipe Calderón, ait soulevé la question dans son discours aux Communes.

M. Calderón a en effet profité de son passage au pays pour dénoncer la décision du Canada d'imposer des visas aux voyageurs mexicains, en juillet 2009.

Lors de son allocution au Parlement, devant les députés et sénateurs canadiens, M. Calderón a dit respecter le droit du Canada de décider de son propre système de migration, mais qu'il ne pouvait s'empêcher de leur faire part de son regret face à ces décisions.

Car si des centaines de milliers de touristes mexicains faisaient le voyage jusqu'au Canada chaque année, ce flux a diminué de près de 40% l'an dernier, selon le président.

«Nous espérons sincèrement que la solution de fond analysée par ce Parlement, grâce à des modifications de votre loi d'asile, sera également un pont qui permettra de renouer avec les échanges de visiteurs», a-t-il plaidé aux parlementaires canadiens, quelques minutes avant que le ministre Kenney ne précise le délai qui serait nécessaire pour ce faire.

Si M. Kenney a dit partager les regrets du président, M. Calderón a de son côté reconnu et déploré qu'il y avait eu des «abus de l'hospitalité canadienne».

L'été dernier, le Canada a décidé d'imposer des visas aux touristes mexicains pour contrôler les fausses demandes de statut de réfugié.

Or, le recul du nombre de touristes venus découvrir le Canada aura néanmoins fait économiser 400 millions de dollars aux contribuables canadiens, grâce à une baisse de 90% des demandes d'asile venant du Mexique, a plaidé le ministre Kenney.

Le différend entre Ottawa et Mexico a en outre été abordé lors de la l'entretien entre M. Calderón et le premier ministre canadien, Stephen Harper, en fin de matinée.

Mais à l'instar de son ministre, M. Harper a réitéré qu'il faudrait patienter le temps que la législation suive le processus parlementaire, tout en reconnaissant que le système canadien «a beaucoup de difficultés».

«Comme le président Calderón l'a dit, (...) avec les visas il y a des vrais coûts pour le Canada. Mais c'est le seul outil que nous avons maintenant pour régler les problèmes des fausses applications», s'est défendu le premier ministre, en point de presse avec M. Calderón suite à leurs discussions.

Autre sujet de discorde: les deux chefs d'État ont par ailleurs abordé la question des changements climatiques, lors de leurs pourparlers.

En point de presse, M. Calderón a d'abord encensé le leadership du Canada en la matière. Mais questionné par les journalistes à savoir s'il était raisonnable d'attendre le plan des États-Unis avant d'agir, comme le fait le Canada, le président mexicain a fait valoir, sans mentionner le Canada, qu'on ne pouvait pas attendre les décisions prises par les pays développés.

«Car la qualité de vie à l'avenir d'une grande partie de l'humanité dépend d'une action assez rapide», a-t-il noté.

Niant que son gouvernement n'en ait pas fait assez pour freiner les changements climatiques, M. Harper a de son côté plaidé qu'il fallait coopérer avec les autres pays et vanté son «approche nationale, continentale et aussi mondiale», trois étapes nécessaires à une entente selon lui.

Cancun, au Mexique, accueillera la Conférence sur le changement climatique des Nations Unies, à la fin de l'année.

Et le réchauffement de la planète a aussi dominé les discussions de M. Calderón avec le chef de l'opposition, Michael Ignatieff, selon ce qu'ont confié des sources à La Presse Canadienne.

Le président Calderón a par ailleurs remercié la Gendarmerie royale du Canada, lors de son discours aux Communes, qui a aidé son pays dans sa lutte contre les cartels de la drogue. MM. Harper et Calderón se sont entendus pour poursuivre ensemble la lutte à la criminalité, en renforçant le système judiciaire mexicain.

Les deux chefs d'État ont également vanté les bonnes relations commerciales entre leurs deux pays, grâce à l'Accord de libre-échange nord-américain (l'ALÉNA), ainsi que le programme des travailleurs agricoles saisonniers.

M. Harper et M. Calderón ont en outre appelé à la coopération, en vue du Sommet du G20 qui se tiendra à Toronto le mois prochain et lors duquel les pays tenteront de poursuivre la lutte à la récession mondiale.

Au terme de leurs pourparlers, MM. Harper et Calderón ont annoncé un accord actualisé sur le transport aérien ainsi qu'un protocole d'entente sur la mobilité de la jeunesse.