Poursuivant sa croisade pour le durcissement des lois, le gouvernement conservateur a annoncé ce matin l'élargissement de la définition d'«infraction grave» à 11 crimes associés aux gangs de rue et au crime organisé.

En vertu de ce règlement appliqué dès aujourd'hui, des infractions comme la tenue d'une maison de jeu ou de pari, les gageures, le bookmaking, le fait de tricher à un jeu de hasard ou la tenue d'une maison de débauche deviennent «graves», s'il est démontré que leur auteur est associé au crime organisé. Les policiers et le système judiciaire pourront lui imposer une série de restrictions -libération conditionnelle retardée, engagement à ne pas troubler l'ordre public, écoute électronique- actuellement prévues pour lutter contre le crime organisé.

Ces infractions ne pouvaient être considérées automatiquement comme «graves» puisqu'elles n'entraînent pas une peine de plus de cinq ans de prison. Le ministre de la Justice fédéral dispose cependant d'un pouvoir constitutionnel qui lui permet de désigner par règlement quelles infractions sont considérées graves.

«Le fait qu'une infraction soit commise par une organisation criminelle en fait un crime grave, a justifié Rob Nicholson, ministre de la Justice et procureur général du Canada, en conférence de presse ce matin au Complexe Guy-Favreau. Quand il y a de l'argent à faire, vous pouvez être sûr que le crime organisé va être impliqué. Les crimes que nous avons ciblés sont considérés comme typiques du crime organisé.»

Est-ce que ce nouveau règlement signifie qu'un simple citoyen accusé d'avoir triché au jeu pourrait encourir une peine de cinq ans de prison?, ont questionné les journalistes. Le ministre s'est fait rassurant : le lien avec le crime organisé doit être «établi à la satisfaction du juge : c'est une question de faits, ils doivent être prouvés».

Présent à la conférence de presse, le sénateur Pierre-Hugues Boisvenu estime que ce nouveau règlement va permettre de punir «plus de crimes graves qui depuis longtemps étaient minimisés et très peu sentencés». «Le gouvernement s'attaque ici aux racines du crime organisé. Lorsque le crime organisé est en cause, quelle que soit l'infraction commise, l'enjeu est énorme.»

Pour les policiers, ce durcissement des lois sera un outil apprécié, estime Jean-Guy Dagenais, président de l'Association des policiers provinciaux du Québec. «Dans l'opération SharQc, ces modifications aux règlements nous auraient peut-être permis d'aller plus loin, a-t-il illustré. Peut-être qu'on aurait arrêté d'autres petits revendeurs, qu'on aurait ratissé plus large.»

Le gouvernement Harper, minoritaire à la Chambre des communes, n'a pas besoin de l'appui des partis d'opposition pour amender le Code criminel en lien avec le crime organisé. En vertu de l'article 467.1, le cabinet fédéral peut modifier les dispositions existantes simplement en avisant le gouverneur général.

Tous les détails du règlement sont disponibles à l'adresse https://canadagazette.gc.ca/rp-pr/p2/2010/2010-08-04/html/sor-dors161-fra.html