Le premier ministre Stephen Harper a remanié légèrement son cabinet, vendredi, afin que le Parlement fonctionne adéquatement cet automne et d'éviter des «élections inutiles».

John Baird, qui passe du ministère des Transports au poste névralgique de leader du gouvernement en Chambre, se voit confier le mandat de trouver les compromis nécessaires avec l'un des trois partis de l'opposition pour assurer la survie de son gouvernement.

Mais le Parti libéral, le Nouveau Parti démocratique (NPD) et le Bloc québécois voient dans la nomination de M.Baird, qu'ils jugent aveuglément partisan et trop combatif, un geste de provocation de la part du premier ministre.

«C'est comme si le premier ministre avait décidé d'envoyer un chien rottweiler en Chambre, mais on ne sait pas s'il portera une muselière», a ironisé le chef du NPD, Jack Layton, dans une entrevue à La Presse.

«Cette nomination ne laisse rien présager de bon pour l'automne. M. Baird a exécuté toutes les basses oeuvres du premier ministre jusqu'ici», a commenté Pierre Paquette, le leader parlementaire du Bloc Québécois.

Le lieutenant politique du chef du Parti libéral au Québec, Marc Garneau, ne s'est pas montré plus enthousiaste: «M.Baird a tendance à faire le bouffon. C'est un ancien ministre du gouvernement Harris de l'Ontario. Il est parfois borné dans certains dossiers.»

M. Harper a été contraint de faire des changements à son cabinet à la suite de la décision de son leader parlementaire, Jay Hill, de ne pas briguer les suffrages aux prochaines élections.

Pour remplacer M.Baird aux Transports, M. Harper a fait appel à Chuck Strahl, qui était responsable des Affaires indiennes. Le député John Duncan, de la Colombie-Britannique, accède au cabinet en succédant à M. Strahl aux Affaires indiennes.

«L'économie demeure la priorité no1 un des Canadiens. C'est aussi la priorité no1 de notre gouvernement. (...) Les Canadiens ont besoin d'un Parlement qui fonctionne pour que la mise oeuvre du plan d'action économique ne soit pas interrompue. Nous souhaitons faire notre part et collaborer avec tous les partis de l'opposition afin de faire passer l'économie avant toute chose», a déclaré M. Harper après avoir annoncé les changements.

«J'ai donné à John (Baird) un mandat très clair: continuer à mettre en oeuvre notre plan d'action pour nous assurer de maintenir le cap en cette période d'incertitude économique mondiale. John a la confiance et le respect de ses collègues et la réputation méritée de faire avancer les choses», a-t-il ajouté.

Des stratèges conservateurs ont fait valoir que M. Harper s'est toujours tourné vers M. Baird pour s'attaquer à des dossiers prioritaires. À titre de président du Conseil du Trésor, c'est lui qui a piloté l'adoption de la Loi sur l'imputabilité pour lutter contre la corruption dès l'arrivée au pouvoir des conservateurs. En 2007, il a été nommé à l'Environnement pour présenter le plan environnemental du gouvernement. En 2008, il a été muté aux Transports, où il a eu le mandat de négocier avec les provinces des ententes visant la rénovation des infrastructures et la relance de l'économie.

«En public, M.Baird peut donner l'image qu'il aime l'affrontement. Mais en privé, c'est un homme qui privilégie la collaboration et les compromis», a dit un stratège conservateur.

Après avoir de nouveau prêté serment, vendredi, M. Baird s'est défendu d'être un «pitbull» aux Communes. «Nous allons travailler d'une manière constructive. Évidemment, nous ne voulons pas d'élections. Nous allons travailler très fort pour accomplir des choses», a-t-il dit.

Durant sa conférence de presse, M. Harper n'a répondu qu'à quatre questions. Un journaliste de la CBC voulait l'interroger sur la controverse entourant le recensement, mais le collaborateur de M. Harper ne l'y a pas autorisé.

Photo: Reuters

Chuck Strahl, John Baird et John Duncan, ce matin, à Rideau Hall.